QUELLE PANDÉMIE EN BD ?
Dès la première page de La Mort rose, qui en compte 255, on est prévenu de son thème par un communiqué télévisé : « Dernière minute : un foyer de fièvre rose a été détecté dans le 5e district de notre cité. Le ministère de la défense a rapidement activé le protocole anticontamination, il a établi un cordon sanitaire autour du quartier et cherche maintenant à localiser l’origine de l’infection… » Cela ne vous rappelle rien ? Eh bien non, il ne s’agit pas d’une bande opportuniste, car l’idée, suscitée par le virus Ebola, avait germé dans l’esprit de l’Espagnol Jaume Pallardo dès 2014, qu’il l’a mise en pratique entre 2016 et 2017, et que la bande a été publiée originellement en deux volumes en 2018 et 2019 – ainsi qu’il le raconte dans une postface (dessinée). On suit donc l’histoire de Miguel , professeur d’art exerçant bien entendu en distanciel et qui, comme tout citoyen, ne peut sortir de son bloc qu’engoncé dans un scaphandre stérile, l’auteur ne nous cachant rien de toute les mesures, désormais banales, qu’il faut assumer pour aller où que ce soit, rencontrer des connaissances dont on voit à peine le visage ne pouvant se faire que couvert de la tête au pied, tant le virus est virulent : « Des petites taches sur la peau indiquent que le virus a attaqué les organes internes qui vont finir par céder et provoquer la mort du patient ». Seulement le danger est-il réel ? Miguel finit par rencontrer une bande de graffeurs qui veulent secouer la conscience en étalant sur les murs ce genre de message : « LE VIRUS N’EXISTE PAS, DÉSHABILLE-TOI ! » – ce qui rappelle aussi quelque chose. C’est donc une véritable dystopie que l’auteur nous livre dans une somme au dessin stylisé, à la limite du naïf, les planches restant au noir-blanc-gris pour les intérieurs, et passant à différentes nuances de rose pour ce qui est des extérieurs. On aimerait voir cet album saisissant en animation, ce qui n’a rien d’étonnant puisque Pallardo vient précisément de là (La Cafetière).
UN « PAQUET» de BD
La résurrection d’Hercule Poirot, le fameux détective belge créé par Agatha Christie doit-il son regain de ferveur aux films de Kenneth Branagh ? En tout cas la BD s’y est mise et pas d’aujourd’hui, puisque les éditions Paquet l’ont remis à l’honneur avec une série d’albums adaptant ses romans, et qui ne datent pas d’aujourd’hui. Pour mémoire : ABC contre Poirot, Le Crime de l’Orient Express, le Crime du golfe, Mort sur le Nil, La Mystérise affaire de Styles, Rendez-vous avec la mort, Ils étaient dix, Les Besford. Dernier en date : Drame en trois actes, où un premier mort par empoisonnement en entraine un second, puis un troisième, le détective, dans la grande tradition, désignant le coupable aux toutes dernières pages d’un album qui en compte 64, scénarisé par Frédéric Brémaux et dessiné de manière assez caricatural, avec une gestuel de film muet, par Alberto Zanon. On suit comme toujours la tortueuse intrigue avec passion (et amusement) tout en trouvant un peu bizarre la moustache de notre héros.
Les éditions Paquet ne s’en tiennent pas là puisque voilà aussi, signé par Sepia, Bera et les Granjans, tome 1 de la série Le Petit peuple, qui nous fait pénétrer dans le monde minuscule et magique des Farfadets, Lutin, Gnomes, Ondins et aussi des Syklvains, dont fait partie le petit (12 cm) héros du volume, lequel n’a qu’un but, essayer de rencontrer les Granjans, à savoir les humains normaux, à supposer bien entendu qu’ils existent. Un décor, un sujet certes pas neuf, si l’on se réfère par exemple à la série des Chapardeurs de Mary Norton, que Hiromasa Yonebayashi a magnifiquement adapté et animé en 2010. Mais ici, le dessin délicat du graphiste, qui a su joliment recréer un monde sylvestre et ses habitants, en donne une variation des plus charmante. Pour les jeunes lecteurs ? Certes, mais nous avons tous et toutes un enfant encore bien éveillé en soi.
UN NOUVEAU DUO CHEZ URBAN COMICS
Ce mois, Urban Comics publie l’originale de Donny Cates et Geoff Shaw qui s’étend sur deux séries : Crossover et The Paybacks.
Après avoir réchappé d'une expérience de mort imminente, Donny Cates se met en quête de l'excitation qui était la sienne lorsqu'adolescent, il poussait la porte d'un comic shop. Avec ce sentiment en tête, il imagine une nouvelle série, Crossover, dans laquelle les héros de papier ont rejoint notre réalité. Poussant un peu plus les mises en abyme, Cates échafaude la rencontre des héros humains de Crossover avec les personnages d'une série annulée, The Paybacks. Heureusement, dans la vraie vie, cette série, devenue un récit complet, existe bien, et paraît en même temps que Crossover ! Dans le premier tome, les héros de toutes les séries comics ont brusquement fait irruption dans notre réalité. Denver, épicentre malheureux de ce Crossover qui voit s'affronter nos personnages favoris, est décimée... Quelques années après le désastre, Ellie, une survivante, tient bon depuis la dernière boutique de comics dans un monde qui a appris à détester ces héros de papier. Lorsque l'une de ces créatures de fiction entre dans la boutique pour chercher de l'aide,
The Paybacks, se fonde sur la réalité comptable des activités super-héroïques. Dans un monde capitaliste, tout a un prix, même combattre le crime ! Il est donc naturel que les super-héros empruntent de l'argent pour financer leurs améliorations génétiques et leur matériel de haute technologie pour traquer les vilains. Mais leurs dettes explosent et les frais de gestion non payés s'accumulent. Pour y remédier, une seule solution, faites appel aux Impayés ! Cette équipe de recouvrement composée d'anciens héros en faillite se chargera de saisir le matériel et les bases secrètes de tous les mauvais payeurs !
UN MUSÉE FANTASTIQUE
L'imaginaire, considéré de nos jours comme non essentiel, laissé pour seul outil des rêveurs et des artistes, est cependant une faculté inhérente à chaque être humain lui permettant d'appréhender le monde, ses multiples réalités et de ce fait mieux construire nos sociétés. Le Naïa Museum regroupe donc plus de 300 œuvres de 85 artistes internationaux avec des sculptures, peintures, œuvres digitales et cinétiques, photographies, bandes dessinées, illustrations, etc. dans l’univers du fantastique et du visionnaire qui questionnent, éveillent la curiosité et invitent à l’imagination.
Musée privé, c’est également une galerie qui propose des œuvres à la vente ainsi que des activités ludiques à partager en famille. Les visiteurs sont les acteurs de leur visite sur les 500m2 du musée, répartis en 6 salles, dont un souterrain médiéval et un jardin.
Ils découvriront des œuvres d’artistes de tous horizons, tels que Yoann Penard, Martina Hoffmann, Stan Manoukian, Olivier Ledroit, Yann Minh, Jakub Rosalski, Paul Toupet… ainsi que de Manu et Patrice, à l’origine du projet.
Tous ces artistes trouvent difficilement leur place dans des musées conventionnels de par leurs mouvements créatifs hors norme :
La science-fiction : romans, bandes dessinées, illustration, cinéma, jeux… ;
Le réalisme fantastique : mouvement de contreculture des années 1960 ;
L’art visionnaire : qui transcende le monde physique pour proposer une vision élargie de la conscience ;
L’art Singulier : distance volontaire ou non avec l’art institutionnel ;
Le Pop Surréalisme : mouvement californien clandestin qui puise son côté onirique dans le mouvement surréaliste et son style graphique dans le pop art ;
Le cyberpunk : univers où le geek informatique et le rocker se rencontrent ;
Le symbolisme : tiré des différents mythes des civilisations présentes ou passées
Naïa Museum
14 rue du Château
56220 Rochefort e Terre
Site internet :
https://www.naiamuseum.com/
Contact
Emmanuelle Hubert
Téléphone : 0297401235 / 0610118345
Email : naiamuseum@gmail.com
CAMUS REVISITÉ
Les éditions Beta Publisher et l’auteur David Gruson présentent l’ouvrage Tuer Camus. Suite aux succès de sa duologie S.A.R.R.A, l’auteur s’inspire de cet univers et raconte la rencontre improbable à travers le temps entre Albert Camus et l’intelligence artificielle., précisant : « entre fiction et réalité, entre robots et humains, il n’y qu’un pas.
Rendez-vous le mardi 19 avril à partir de 18h30 au BKNK, 11 rue Blanche, 75009 Paris. Il est prudent de confirmer sa présence auprès de
Philippine Bacquart : 06 77 08 48 63 ou Bacquart.philippine@gmail.com
ANIMES EN VRAC
L’équipe d’Animeland, magasine sur l’animation japonaise en France s’est lancée dans une encyclopédie en plusieurs volumes sur l’histoire de l’animation japonaise, de ses débuts à nos jours. Un premier volume était paru l’an dernier, dont nous avons bien en tendu rendu compte ici. Voici maintenant l’ Encyclopédie des animés n° 2 (1980 – 1988), années ayant vu l’émergence des classiques du Shônen qui ont fait les beaux jours des programmes jeunesse de la télévision française. Se développent également les O.AZ.V., programmes animés destiné prioritairement au format vidéo, étape intermédiaire avant les chaînes spécialisés et les sites de streaming. Ceci répertorié dans un album de 144 pages, où sont présentés pas moins de 700 métrages, chacun accompagné bien entendu d’une illustration, d’un résumé de l’histoire et d’un générique complet. De quoi revisiter Dragon Ball, Mon voisin Totoro, Les Mystérieuses cité d’or, Signé Cat’s Eyes, Akira, Olive et Tom et tant d’autres. Sans oublier un lexique des termes techniques. Que signifie par exemple Kemono ? Réponse dans cet utile répertoire (Ynnis).
Le même éditeur nous offre cette même semaine un très beau cadeau, en l’occurrence Voyage avec Chihiro, magnifique ouvrages solidement cartonné, épais de 288 pages, et qui n’est pas dû à un auteur japonais mais à une afficionados espagnole, Marta Garcia Villar, qui a traité de la manière la plus complète possible toutes les phases de la conception et de la fabrication du chef-d’œuvre du Maître, en 13 chapitres précisément conçus : L’équipe de création ; Contexte et production, qui nous rappelle que le film est sorti en 2011, inaugurant ainsi, il y a 20 ans, une décennie nouvelle ; Les personnages, où l’on apprend que Miyazaki et son animateur Masashi Andô avaient des différences d’appréciation, le réalisateur voulant un personnage plus volontaire et pas une petite fille apeurée ; mais aussi Thèmes et constantes ; la Musique ; les Influences ; son insertion dans le folklore japonais et autres approches, toute intéressantes. On s’amusera enfin avec le fort chapitre Merchandising, où sont répertoriés tous les objets venus du monde de Chihiro, tasses et rideaux de bain, figurines, cartes, albums et CD, et même des montres.
Un tour du monde de Chihiro qui ne provoque qu’une envie : revoir le film (Ynnis).
JEAN-PIERRE ANDREVON