The Suicide Squad réussit sa réincarnation...
...et Jungle Cruise tente de capter l'esprit de Pirates des Caraïbes.
BOX-OFFICE
Pour «Jungle Cruise», Disney avait prévu des débuts estimés entre 25 et 30 millions de dollars au niveau national, mais le film a fini par dépasser ces attentes avec 34,2 millions de dollars. À l'étranger, où de nombreux pays voient les cas de coronavirus augmenter, il a rapporté 27,6 millions de dollars sur 47 marchés. Sa diffusion sur Disney + Premier Access dans le monde entier lui a permis de remporter 30 millions de dollars supplémentaires – donnant au film un début moyen de 91,8 millions de dollars. Le film a coûté environ 200 millions de dollars sans le marketing et la promotion et devrait donc avoir du mal à réaliser des bénéfices, en particulier avec la variante Delta qui continue de s'imposer sur de nombreux marchés mondiaux.
"The Suicide Squad" de James Gunn a été diffusé sur cinq petits marchés étrangers cette semaine et a été un succès, rapportant 7 millions de dollars et battant "Jungle Cruise" au Royaume-Uni (4,7 millions de dollars contre 3,2 millions de dollars).
FILMS SORTIS
JUNGLE CRUISE ***
USA. 2021. Réal.: Jaume Collet-Serra.
SORTIE : 28 JUILLET 2021
L’intrépide Lily Houghton et son frère nettement plus falot McGregor débarquent en Amazonie, à la recherche d’un arbre mystérieux dont les fleurs, les «larmes de la lune», auraient un pouvoir de guérison sur toutes les maladies. Pour remonter le long fleuve intranquille de l’Amazone, ils frètent le dernier bateau disponible, une véritable épave flottante dont le skippeur, Frank Wolf, d’une honnêteté douteuse, a pour habitude de gruger ses passagers en les confrontant à des dangers imaginaires ou montés de toutes pièces, dont le clou est un léopard apprivoisé, censé être un féroce mangeur d’hommes mais en réalité doux comme un chaton…
Que doit-on attendre d’une grande aventure de ce genre, dérivée d’une attraction de parc Disney ? De multiples incidents, comme cette dérive vers des chutes évitées de justesse, la rencontre avec de terribles cannibales et, le récit étant daté de 1916, la présence d’un Allemand, le prince Joachim qui, à bord de son sous-marin, traque nos chercheurs. Et sous quel feu doit se cuisiner ce repas du dimanche ? Celui de la pure fantaisie bien sûr, portée par un duo de choc : Dwayne Johnson toujours adepte du second degré, et la formidable Emily Blunt (Sans un bruit), capable de se tirer de n’importe quelle situation. Certes, on pense à Indiana Jones (Lily en porte même lechapeau), aussi À la poursuite du diamant vert et même The Fountain de Darren Aronofsky, toutes références assumées qui confortent la familiarité avec une production où Jaume Collet-Serra, plutôt d’ordinaire formaté dans l’intimiste, se montre très l’aise pour déployer en champs larges de beaux décors sylvestres, sans oublier quelques plans originaux d’un Londres grouillant. Dans le dernier tiers de l’œuvre, le fantastique fait une entrée en force avec les fantômes d’une bande de conquistadores délabrés et enrubannés de serpents qui semblent, eux, surgis des Pirates des Caraïbes, d’autant que la caméra parait brusquement atteinte de folie, à vous en donner le mal de mer !
Jean-Pierre Andrevon
THE SUICIDE SQUAD *****
Réal. & scén.: James Gunn.
SORTIE: 28 JUILLET 2021.
Pour envahir l’île de Corto Maltese (Cuba ?), aux mains du général-dictateur Silvio Luna qui s’est accaparé une mystérieuse créature ramenée de l’espace par une équipe d’astronautes américain, Amanda Waller, créatrice du Suicid Squad, n’a d’autre solution qu’extraire de leur prison une bande digne des Douze salopards selon Aldrich, dont Bloodsport, qui a envoyé Superman en réanimation pour lui avoir tiré dessus avec une balle en kyptonite. En prenant la précaution de diviser les envahisseurs en deux équipes. Première surprise, l’équipe n° 1, qu’on nous a longuement présentée, avec Savant comme chef, Javelin en idiot, Belette qu’on prend pour un loup-garou ou encore Harley Quinn (la plus que craquante Margot Robbie) sont immédiatement dessoudés à peine le pied posé dans leur simili Baie des Cochons. Seconde surprise, non, tout compte fait, ils ne sont pas tous mort, notamment Harley, sans qui le film perdrait beaucoup de son charme acide, et qui réapparait fraîche comme une rose rouge, de la couleur de la robe qu’elle ne quittera jamais, après s’être échappée des geôles de Luna où elle venait d’être torturée avec le sourire. Ainsi rejoint-elle l’équipe n° 2, commandée par Bloodsport (Idris Elba), qui a une sainte horreur des rats, ce qui ne va pas sans poser des problèmes car il a sous ses ordres Ratcatcher qui, non seulement ne se sépare pas de son animal favori, mais peut en susciter des millions d’un seul geste. Citons encore Peace Maker, titreur infaillible qui a une drôle de façon de maintenir la paix, et le colossal, invulnérable et increvable Sharkman, sous la peau duquel on a du mal à reconnaître Sylvester Stallone. Ne reste plus à cette fine équipe qui en remontrerait à la Justice League, après avoir semé les morts sur leur passage, à envahir la tour monumentale où se cache Starro, la créature de l’espace en forme d’étoile de mer (hommage au classique japonais Le Satellite mystérieux de Kôji Shima,1956) qui a monstrueusement grossi, s’en échappe et dévaste la ville avec autant d’efficacité que Godzilla, répandant qui plus est sur ses habitants de multiples clones qui se fixent sur les visages. Doté d’un rythme effréné, meilleur encore que la précédente version de David Ayer, voilà un James Gunn de la classe des Gardiens de la galaxie, riche de la caractérisation de ses piteux héros, et qui n’épargne pas la politique des États-Unis ni la perversité de ses services secrets.
Jean-Pierre Andrevon
FILMS EV VOD
MAJOR GROM : LE DOCTEUR DE PESTE****
(Mayor Grom : Chumnoy Doktor) Russie. 2021. Réal.:Oleg Trofim. (Netflix)
À Saint-Pétersbourg, dans une Russie vérolée par la corruption, le major Grom, un flic intraitable, a bien du mal à mener à bien sa mission, les criminels arrêtés se retrouvant rapidement libérés s’ils ont les moyens de graisser la patte du juge. Le fils d’un milliardaire, accusé d’avoir tué une petite fille alors qu’il était ivre au volant de son puissant bolide, est le dernier exemple du dysfonctionnement de la justice. Mais le lendemain de sa relaxe, il est agressé et assassiné chez lui sous les coups d’un étrange super-héros, le Docteur de Peste, à la justice expéditive et ultra violente rendue à l’aide de lance-flammes fixés à ses poignets. Costumé comme Batman, le visage caché par un masque à bec évoquant les médecins du temps de la peste, ce sombre justicier reçoit un soutien grandissant de la population qui vit sous le joug des plus fortunés. Mais Grom est en totale contradiction avec ses méthodes, et décide de l’arrêter. L’affaire s’annonce cependant difficile, car sans cesse sur la sellette pour ses agissements jugés extrêmes par sa hiérarchie. Il n’a pour seuls "pouvoirs" qu’une volonté de fer et une capacité à entrevoir l’issue de l’action en avance, à la façon de Sherlock Holmes. Cela risque malheureusement de s’avérer un peu insuffisant face au Docteur de Peste…
En proposant l’adaptation de sa bande dessinée au réalisateur Oleg Trofim, Artyom Gabrelyanov frappe un grand coup. Il résulte en effet de cela un film d’action grandiose, totalement différent de ce qu’Hollywood – et la France – peut offrir dans le genre. Le dépaysement est total, l’intrigue ne se déroulant pas à Moscou, mais à Saint-Pétersbourg, ce qui nous permet de découvrir des paysages grandement inédits. La société russe est également dépeinte avec une certaine honnêteté, avec sa corruption et ses difficultés quotidiennes. Le "super-vilain" est, pour la première fois, le seul justicier costumier, en inversion totale avec les codes des comic books. Si la violence de l’action peut parfois évoquer des titres américains comme "The Boys", la critique du système est tellement implicite qu’elle écarte toute accusation de "plagiat". On ne peut qu’approuver le choix de Netflix de nous proposer ainsi une vision nationale d’un pays, bien loin des images édulcorées, policées et fantasmées de la Chine des productions américaines ou chinoises. On s’étonne même qu’un tel film ait pu voir le jour dans ce pays où la liberté d’expression est plus un souhait qu’une réalité. La fin, ouverte, marque Major Grom du sceau de premier opus d’une franchise, et l’on ne peut, une fois n’est pas coutume, que s’en réjouir !
Yann Lebecque
AFTER MIDNIGHT***
USA. 2019. Réal.: Jeremy Gardner, Christian Stella. (Shadowz)
Hank et Abby vivent dans une petite bourgade depuis des années, et coulent des jours heureux dans ce coin perdu des États-Unis. Mais un jour, Abby s’absente en laissant un mot, sans revenir, et Hank se retrouve un peu sans repères. Dès lors, tous les soirs, une étrange créature humanoïde attaque la maison au milieu de la nuit, et personne ne le croit, surtout pas le frère d’Abby, policier de cette localité. Seul Wade, copain de beuverie et de chasse, lui prête une oreille amicale. Qui est ce monstre, et pourquoi semble-t-il vouloir entrer dans la maison ?
Après The Battery, le duo Gardner/Stella revient avec un film d’horreur existentiel, et la présence parmi les producteurs de Justin Benson et Aaron Moorhead (Spring, The Endless, Resolution) donne un indice sur l’originalité du métrage. Très loin du film de monstre auquel on pourrait s’attendre, il s’intéresse davantage à la relation entre Hank et Abby, au temps qui passe, aux non-dits qui peuvent mener un couple à sa fin. Les dialogues sont pleins de vérité, et la présence de Jeremy Gardner (déjà présent dans Spring et dans son premier film) et Brea Grant (12 Hour Shift, Lucky) apporte toute la crédibilité à l’ensemble, notamment lors d’un long monologue, caméra posée, où le couple fait le point sur son histoire. Plus dramatique qu’horrifique, laissant quelques questions en suspens, After Midnight n’en demeure pas moins une franche réussite, allant au bout de son concept de son originalité.
Yann Lebecque
SPIRAL***
Canada. 2019. Réal.: Kurtis David Harder. (Shadowz)
Malik et Aaron, couple homosexuel, viennent s’installer dans une petite ville calme pour y élever la fille d’Aaron, Kayla, loin des tourments des mégalopoles. Arrivés sur place, ils sont accueillis par une voisine amicale, mais Malik cache la vérité à son compagnon : des messages haineux et d’étranges cérémonies tenues dans une maison proche lui font penser qu’ils sont peut-être en danger, et qu’ici ou ailleurs, ils ne pourront pas trouver la sécurité. L’homme a de quoi avoir des angoisses, puisqu’il a vécu, très jeune, le passage à tabac d’un petit ami par une bande d’hommes violents. Peu à peu, cependant, ses doutes semblent avérés, et il a le plus grand mal à avertir ceux qu’il aime…
Film paranoïaque, Spiral bénéficie d’un scénario bien pensé de Colin Minihan des Vicious Brothers (Grave Encounters et sa suite, Extraterrestrial, It Stains the Sands Red, Still/Born) et John Poloquin (Grave Encounters 2) qui fonctionne à la manière de l’épouvante selon Ari Aster, créant une ambiance suffocante où les apparences sont trompeuses et l’ennemi omniprésent, quel que soit l’image qu’il donne de lui. Le film repose principalement sur les épaules de Jeffrey Bowyer-Chapman (Grave Encounters 2) qui offre une belle interprétation de ce personnage pointé du doigt pour son orientation sexuelle et sa couleur de peau. Car Spiral a un message à faire passer, celui du triste constat que la majorité des gens sont guidés par leurs idées préconçues, le poids des préjugés et le panurgisme. Rien de bien neuf, donc, mais le thème est présenté sous un angle original, violent et poignant à la fois.
Yann Lebecque