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Au début, Frank Margerin avait un gros nez
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LES DÉBUTS DE FRANK MARGERIN
Frank Margerin
Ayant débuté en 1976 à Métal Hurlant, passé à L’Écho des savanes en 2002, et enfin à Fluide glacial en 2008, où il s’active aujourd’hui encore, Frank Margerin, illustre créateur de Lucien, le rockeur à la banane et de Momo, le livreur au grand cœur, n’est pas spécialement associé à la sf… Grossière erreur, ce que nous prouve de manière éclatante L’intégrale Frank Margerin présente qui, sur 184 pages, va de ses débuts à 1989, où il a définitivement assis sa personnalité de « dessinateur de personnages à gros nez ». Mais laissons-lui la parole : « À mes débuts, je travaillais à la plume, ce qui m’obligeait à remplir mes cases de petites hachures. Maladroit dans la construction de mes personnages, je truffais mes décors de nombreux petits détails. Métal Hurlant étant une revue de science-fiction, je me sentais obligé de rajouter des petits extra-terrestres dans mes histoires, ou de parodier des super-héros franchouillards totalement ringards ». N'en déplaise à l’auteur, et comme nous sommes ici en territoire sf, ce sont ses débuts qu’on peut préférer, ainsi de sa première bande en noir et blanc, Simone et Léon (il y a un E.T. dans mon lit), que suit en couleur Quand l’amour frappe à ma porte, avec la prestation d’un Superman dont les préférences sexuelles se révèlent… mais vous avez compris. En haut de la pile, on dégustera La Conquête de Pluton, une aventure de Guy Leclerc due à un certain Raymond Relax, où toute ressemblance avec une célèbre série US serait absolument fortuite, sans oublier une fin du monde à sa manière vécue par Fernand Leplin (Les Cinq dernières heures), qui n’est que l’un des innombrables personnages de franchouillards (avec Albert le cocu heureux, Flipo et son train électrique, Albert Dublanc, Raoul et tant d’autres) dont il se plaît à moquer les travers. De toute façon, sf ou non, avec Frank Margerin, ce que l’on doit retenir, c’est qu’on s’amuse et on rigole à chaque page, au point d’en redemander (Fluide glacial).
LES EXTRATERRESTRES ATTAQUENT
Quel est le thème qui désigne de manière la plus évidente la science-fiction ? L’extraterrestre, bien sûr… Ce qui vient d’ailleurs, pour le pire ou le meilleur, celui qui peut être notre double comme notre envers, en somme l’autre, l’étranger, support et matérialisation des plus grandes craintes comme des plus grands espoirs. Il n’y a qu’à lever les yeux au ciel par une belle nuit d’été, voire ces étoiles fourmillantes et, oubliant un instant le paradoxe de Fermi, se dire que forcément, là-haut… Le paradoxe de Fermi, justement, qui résume tout : « S’il y avait des civilisations extraterrestres, leurs représentants devraient être déjà chez nous. Où sont-ils donc ? » Bonne question, à laquelle répond, dans un mince (220 pages) mais très complet ouvrage, Les Extraterrestres, Stéphane Benaïm qui ne manque pas d'ajouter cette sentence d’Arthur C. Clarke : « Deux possibilités existent : soit nous sommes seuls dans l’univers, soit nous le sommes pas. Les deux hypothèses sont tout aussi effrayantes ». Découpés en 7 chapitres commençant par « Premiers voyages » (Méliès en tête), cette étude d’un ancien collaborateur de l’Écran, dédiée à Alain Schlockoff (qui m’a) « transmis sa passion du cinéma fantastique », et qui souligne les capacité protéiformes du genre (horreur, fantastique, western, space opera, comédie, super-héros, fantasy, policier), n’en ignore pas non plus qu’il est « un formidable révélateur social, se parant d’une couleur politique forcément engagée », comme le prouve par exemple District 9 de Neill Blomkamp dénonçant le racisme en Afrique du Sud, sans oublier l’œuvre fondatrice qu’est Le Jour où la Terre s’arrêta.
On ne peut quitter l’éditeur d’une prolixité étonnante de cet ouvrage sans signaler le sixième volume de l’indispensable collection « Une histoire du cinéma français » qui court de décennie en décennie depuis les années 30, ici la décennie 1970-1979, par Denis Zorgniotti et Ulysse LLedo. Si, dans ces années 70, bien peu de grands films fantastiques émergent en France, l’ouvrage au moins ne fait pas l’impasse sur Le Locataire de Roman Polanski (1976) ni, l’année suivante, sur Providence d’Alain Resnais, même s’il passe un peu vite sur le méconnu Ils de Jean-Daniel Simon ou L’Alliance, superbe réussite de Christian de Callonge, d’après Jean-Claude Carrière. On ne peut tout avoir (LettMotif).
ODIN, THOR ET AUTRES SUPER-HÉROS NORDIQUES
S’il est des noms à sonner de manière familière à l’oreille des fantasticophiles,
c’est bien ceux cités en titre, à quoi l’on peut ajouter Loki et toute une cohorte de créatures qui vont des elfes aux trolls, des amazones aux gnomes, depuis que le cinéma s’en est emparé. Un magnifique ouvrage encyclopédique, Le Grand Atlas de mythologie nordique, signé Jean-Baptiste rendu, nous apporte à ce sujet tout ce qu’il nécessaire de savoir, grâce aux érudits islandais des XIIIè et XIVè siècle qui ont mis en ordre et rapporté la cosmologie nordique, « l’une des plus riches de toute la littérature mondiale », où l’on sera pas étonné de trouver des parallèles avec le Panthéon grec, Odin pour Zeus, le Valhalla pour l’Olympe, ou même avec l’Ancien Testament chrétien, la bataille de la fin des temps de Ragnarök ressemblant beaucoup à l’Apocalypse. Passionnantes à lire, ces 224 pages solidement couverturées comportent nombre d’illustration, ainsi des gravures de Gustave Doré et autres toiles du XIXè siècle (Glénat).
DE LA SF AU POLAR
On connait Richard Canal pour son œuvre en sf (Upside Down), d’une qualité irréprochable. Et voilà que, sautant un pas que bien d’autre auteurs du genre ont fait avant lui (Asimov lui-même !), il passe au polar avec La Valse des Mckinleys, ouvrage costaud (440 pages) où l’on retrouve son art de trousser une intrigue touffue liée par un grand nombre de personnages au dessin précisément calligraphié servi par un style à son habitude fleuri – témoin son héroïne, Alice, « au visage exquis de Californienne chéri par le soleil (….), des yeux bleu mauve de la vieille Europe, embrumés, chargés d’une nostalgie profonde (traduisant) parfaitement la part d’ombre qui faisait d’elle le petit monstre qu’elle éta it». Contrairement à nombre de ses confrères, Canal n’a pas contraint son récit aux marges franchouillardes, le situant au contraire au centre imprécis des États-Unis, dans le petit bourg d’Ulysse, autrefois important centre sidérurgique réduit, crise oblige, à l’ombre de ce qu’il fut, d’où prise en main d’une mafia italo-américaine. Ayant étudié son background à la loupe, l’auteur en donne une image des plus crédibles, à tel point que son roman pourrait passer pour une traduction de l’américain. Ulysse étant qui plus est frappé continuellement par une pluie battante, on sent que Canal a pris un plaisir évident à déborder sur le thème des changements climatiques, ce que l’auteur de sf ne pouvait négliger. Un régal (Éditions du caïman).
DU NOUVEAU AU ROYAUME DES MOOKS
Qu’est-ce que Estrange ? Format presque Carré, 175 pages, c’est le nouveau mook à s’installer sur les rayonnages. Créé et dirigé par François Theurel, c’est «la nouvelle revue semestrielle dédiée aux mystère modernes », destinée à « explorer l’étrangeté du monde qui nous entoure sous toutes ses facettes : technologies émergentes nouvelles réalités phénomènes bizarres, contreculture, science-fiction futurologie, cinéma, musique, littérature et bien plus encore ». Dans ce premier numéro, pour tenter, dixit Theurel, de commencer à cerner «un monde frénétique et complexe qui s’emballe, un monde en ébullition qui nous semble toujours plus autre où notre perception se trouve noyée», piochons, de Théo Drieu, les mystères de la matière noire dont est composé 95 % de notre univers, un très long entretien avec Naomi Roth, spécialiste des réalités virtuelles, un débat sur les ovnis (Pierre Lagrange) prenant comme point de départ le film de Jordan Peele Nope, et bien d’autres approches, chacune faisant l’objet de textes aussi denses que pointus. Ce pavé, que les très anciens lecteurs pourront comparer à l’illustre Planète de jadis n’est pas avare en illustrations, avec plusieurs Portfolio : Nona Limmen et ses vaporeuse photos noir et blanc, ou Mothmeister et ses personnages « improbables, errants, brinqueballants ». Un total qui en impose et donc une bonne chance à ce nouveau confrère (Gallimard/Hoëbeke).
LE PRIX JULIA VERLANGER À CLAIRE GARAND
Les éditions La Volte ont le plaisir de nous annoncer que le roman Paideia, de Claire Garand (Les Maîtres de la lumière), publié ce printemps (et qui nous avait échappé, honte sur nous), a obtenu l’envié prix Julia Verlanger. Dix petites filles dans dix stations en orbite autour de la Lune sont les derniers espoirs de l’humanité morte sur une Terre empoisonnée. Leur destin, être les futures mères de l’humanité, sur la Lune terraformée, où elles passeront toute leur existence. Sauf que l’une d’elle va se révolter. Mais comment agir depuis sa boîte de conserve, seule au milieu du vide ? Félicitation à la lauréate !
JEAN-PIERRE ANDREVON