"Nue pour l'assassin", le Giallo en majesté.
Sang, érotisme et couleurs bien saturées, tels étaient les chefs d'oeuvre de l'horreur à l'italienne.
LIVRES
LE GIALLO EN MAJESTÉ
UNE ÉTUDE EN JAUNE – Giallos et Thrillers européens
Frédéric Pizzoferrato
Connaissez-vous Eroticofollia (Mario Siciliano), La Lame infernale (Massimo Dallamano), Nue pour l’assassin (Andrea Buanchi), La Dame rouge tua sept fois (Emilio P. Miraglia) ? Et quelques 250 autres métrages tournés essentiellement en Italie mais pas que, entre La Fille qui en savait trop de Mario Bava (1963), que l’on considère comme la première pièce de ce qui va être appelé le giallo et des œuvres beaucoup récentes, rattachées comme par raccroc au genre, ainsi de L’Étrange couleur des larmes de ton corps, d’Hélène Vattet et Bruno Forzani en 2013 ? On trouve tout celà dans ce magnifique album de 396 pages très richement illustrées, qui fait le tour complet sur le sujet. Et que le maître d’œuvre présente ainsi : « Le cinéma italien des années 60-70 a donné ses lettres de noblesse au cinéma de genre en développant une poésie de l’exploitation assez unique : ses excès graphiques ont généré une grammaire cinématographique singulière donnant une nouvelle dimension à l’érotisme et à la violence. Il s’agit d’un tournant esthétique et éthique majeur du cinéma moderne ». De longues études sur les plus fameux réalisateurs du genre (Bava, Fulci, Lenzi, Martino, Argento), chacun de leurs films étant précisément commentés, un point sur Les Diaboliques de Clouzot considéré comme le grand précurseur, un autre sur les « krimi » allemands, un long chapitre sur l’âge d’or du genre (1962-1979), des critiques élaborées de tous les films présentés, voilà le succinct état d’un ouvrages aussi irréprochable qu’indispensable, une date dans l’histoire de l’édition des livres sur le cinéma (Artus films).
L’AUTEUR DU MOIS : STANISLAS LEM
Laboratoire intellectuel du travail romanesque et véritable boîte à bijoux imaginaires, Les Aventures du pilote Pirx révèle enfin au public français les tribulations drolatiques et philosophiques de l’un des personnages les plus attachants de l’histoire de la science-fiction et nous fait pénétrer, par le petit bout de la lorgnette, dans la fabrique de l’une des œuvres de SF les plus ambitieuses du XXe siècle. De sa formation de cadet au commandement d’un vaisseau, ce recueil met en scène les aventures d’un pilote spatial hors du commun, dont les missions extraterrestres sont marquées du sceau de l’inattendu. On suit Pirx piètre cadet, dans son premier vol-test qui ne tarde pas à tourner à la catastrophe ; patrouilleur de l’espace, lorsque son vaisseau est suivi par une mystérieuse lumière blanche, insaisissable et froide ; chargé d’un transport de marchandises à bord d’un antique vaisseau, aux côtés d’un robot rouillé qui rejoue en boucle et en morse l’agonie d’un ancien équipage après une mystérieuse avarie… Avec les aventures picaresques de son antihéros, Lem déconstruit le mythe d’une science-fiction fascinée par le caractère extraordinaire du voyage spatial. Décidant de scruter le doigt plutôt que de regarder la lune, il s’intéresse davantage aux pépins mécaniques des machines du futur qu’aux nouveaux horizons qu’elles ouvrent, et s’ancre dans le quotidien routinier d’un futur qui ressemble en cela beaucoup à notre présent (Actes Sud).
De Lem toujours, on n’a pas oublié son chef-d’œuvre, Solaris, deux fois adapté au cinéma: Alors que les recherches autour de la planète Solaris et de son mystérieux océan – qui semble doué d'une certaine forme d'intelligence – sont au point mort, le professeur Kris Kelvin rejoint ses confrères dans la station spatiale scientifique gravitant autour de l'astre aux deux soleils. En arrivant, Kris constate que les choses ne tournent pas rond à bord, et que des visiteurs, venus des méandres du passé, peuplent également les lieux. En même temps reparait Le Congrès de futurologie, lui aussi adapté au cinéma par le réalisateur israélien Ari Folman. Alors que le huitième congrès de futurologie sur le problème de l'explosion démographique vient de débuter au Hilton de Costaricana, un soulèvement des populations éclate, aussitôt réprimé par le gouvernement à grandes doses de supercarésine et de félicitol, de puissants psychotropes. Le Pr Ijon Ticky, un futurologue, parvient à se retrancher dans les égouts avec certains de ses confrères. Le tout pour lui va maintenant être de ne pas sombrer dans l'illusion. Entre dystopie, satire et comédie, ce roman halluciné invite à réfléchir à demain et à notre rapport au réel. Une trilogie à ne pas manquer par un grand de la SH qu’on aurait garde d’oublier (Babel).
Jean-Pierre Andrevon
BD
Agughia, par Hugues Micol.
La navette Radius03 en provenance de la station relais Radius X-07 s’est posée à Figari, en Corse. Dans un taxi, son passager discute avec le chauffeur qui déplore le tourisme de luxe. Ce dernier s’emporte contre le vaste plan d’aménagement du territoire remporté par Radius – une multinationale omnipotente et tentaculaire... Le dérèglement climatique a bouleversé le cycle des saisons, et les Corses ont dû s’adapter : pour survivre, ils n’ont d’autre choix que d’accepter ce tourisme dévoyé. Avec Agughia, Hugues Micol signe un remarquable récit d’aventures et de science-fiction. Amoureux du genre, il réunit tous les ingrédients d’une bonne histoire, qu’il agrémente d’une juste dose d’humour. Un scénario fluide, des dialogues qui sonnent juste, et des scènes d’action nombreuses et spectaculaires, sont au rendez-vous. Mais cet album parle aussi d’écologie et d’environnement. Incontestablement engagé, ultra- convaincant, l’auteur pousse le lecteur à la réflexion car… « Et si tout cela était possible ? » (Dargaud).
Copra, par Michel Fiffre.
Une équipe de laissés-pour-compte chargés de faire le boulot dont les agences gouvernementales ne veulent pas. Après une opération clandestine qui tourne (très) mal, ils sont contraints de se faire discrets mais se jurent de retrouver ceux qui les ont trahis afin de régler leur sort... Comic-book sale, méchant, brutal, aux personnages moralement ambigus, Copra est l’œuvre-phare de Michel Fiffe, auteur de Panorama ovni fantastico-horrifique récemment salué par la critique. Série créée et auto-publiée à partir de 2012, Copra se veut une sorte de Suicide Squad dans lequel on croise une galerie de personnages qui rappellera aux amateurs de comics certaines figures tirées des univers Marvel ou DC, têtes d’affiches ou personnages obscurs, dont l’auteur s’est inspiré tout en les détournant à loisir pour mieux les malmener. Depuis son lancement il y a près de 10 ans, la série ne cesse au fil des pages de cette œuvre imposante (6 volumes à ce jour) de surprendre et de susciter l’enthousiasme du milieu de la bande dessinée américaine. Voici donc un premier volume de 160 pages (Délirium).
DU CÔTÉ DES COMICS
RED SONJA volume 2 : LA DIABLESSE À L’ÉPÉE
Roy Thomas & Frank Thorne
L’âge hyborien, un monde sauvage régi par le glaive. Une terre de héros tels que Conan le Cimmérien, Kull le Conquérant et... Red Sonja, la diablesse à l’épée, la guerrière d’Hyrkanie créée par . Cette héroïne rousse à la fine lame, capable de tenir tête aux guerriers les plus téméraires, revient... ou plutôt débute car c’est ici que tout commence ! Deuxième opus consacré à ses aventures originales, ce volume regroupe les 7 premiers épisodes de la série que Marvel créée spécifiquement pour la Diablesse à l’épée : Red Sonja, the she-devil with a sword, parus aux USA entre janvier 1977 et janvier 1978. Un album qui regroupe les plus belles histoires de Frank Thorne– 136 pages d’action non stop, avec le discret érotisme qu’entraine cette héroïne au sang chaud crée par Robert Howard (Graff-Zeppelin).
BELLES IMAGES
DRAGONS ET CHIMÈRES
Collectif
Les dragons font partie de l’imaginaire de tous temps et de tous pays… Voilà un album qui nous le rappelle avec de nombreux exemples, de la fameuse hydre de Lerne que terrassa Héraclès au dragon que Saint George embrocha de sa lance, en passant par le Quetzalcoatl ou serpent ailé des Aztèques, et le moins connu Tatzelwurm, tête de chat corps de serpent des Alpes autrichiennes au XIXe siècle.
Comme le constate, le dragon est toujours un reptile, ce qui prouve bien l’horreur que provoquait cette classe d’animaux. Mais d’où venait cette croyance et cette identification ? Pas des squelettes de dinosaures en tout cas, puisque les premiers ne furent découvert qu’au milieu du XIXe siècle. Un bel album de 200 pages très richement illustré nous permet en tout cas de surfer à travers ces bêtes imaginaires qu’inventa, au choix, de mauvaises observations ou la crédulité en une surnature menaçante (Glénat).
THE WITCHER – LE DERNIER VŒU
Andrzej Sapkowski & Mikaël Bourgouin
Alors qu’ils s’adonnent à une paisible partie de pêche, Geralt et Jaskier libèrent un djinn enfermé dans une amphore, qui blesse grièvement le troubadour. Seule personne capable de le guérir : la magicienne Yennefer de Vengerberg… Le départ de ce pseudo conte gothique est tiré de l’œuvre de l’écrivain polonais Andrzej Sapkowski, dont la saga du Sorceleur, non contente d’être traduit en 37 langues et vendue à 15 millions d’exemplaires dans le monde, est devenu jeu vidéo, puis un film produit par Netflix. C’est une partie de cette saga qui a inspiré le peintre et graphiste Mikaël Bourgouin pour un grand album de 60 pages format 38 sur 28 dont chaque planche est un véritable tableau. Pour les amateurs d’héroic fantasy (Bragelonne).
LE CODEX DE SIMON DE THUILLIERES par lui-même.
La légende raconte que Simon de Thuillières serait un enlumineur de l'an 1385 qui, touché par un mystérieux sortilège, aurait eu le don d'anticiper les œuvres phares de la pop culture de ses lointains descendants du XXIe siècle. Et Simon de Thuillières, le vrai, est connu pour ses illustrations de films, séries, jeux vidéo et dessins animés revisités avec humour au style médiéval et en vieux français, tel qu’auraient pu la voir nos aïeux du moyen-âge en l'an de grâce 1395. En moins d'un an, il s'est fait connaître en rassemblant ses œuvres sur ses réseaux sociaux qui ont très vite rencontré un franc succès. Chaque semaine, ses illustrations sont partagées par milliers. D’où un bel ouvrage de 174 pages (et de 1,4 kg) rassemblant ses enluminures les plus appréciées, mais également de nombreuses créations inédites et d'autres surprises. Chez l’auteur, mais disponible dans toute librairie.
Jean-Pierre Andrevon