Napoléon Bonaparte combat les sorciers dans "Ars Obscura"
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ALVA DANS LA NUIT DU GRAND NORD
Deux cambrioleurs d’un certain âge, Morten et Mini, ayant eu vent qu’un receleur croulait les pièces d’or, lui font nuitamment une petite visite, ayant pu s’introduire chez lui grâce à leur jeune complice Alva, adolescente qui possède un don surprenant : pouvoir grimper comme une araignée sur n’importe quelle façade et donc ouvrir les portes. Seulement l’appartement de leur victime possède une pièce secrète où est enfermée une sorcière, Sisdel qui, comme la poule aux yeux d’or, crache des pépites dès qu’elle ouvre la bouche. Libérée, la créature, qui se présente comme une harpie filiforme de 3 mètre de haut, tue son geôlier et Morten, mettant ensuit fuite Mini, mais épargnant Alva qu’elle a reconnue, après l’avoir reniflée, comme faisant partie de son espèce, le peuple Fjell. Nous sommes au cœur de l’hiver, dans les faubourgs d’une ville scandinave anonyme, que nous allons quitter pour une longue remontée vers le Nord où Alva, qui a rejoint Mini, veut retrouver son peuple, le duo étant traqué par les Artisans, un groupe de mercenaires ayant la fâcheuse habitude cribler leurs adversaires de clous à la solde de Falk, propriétaire d’une entreprise pharmaceutique sur le déclin et bien décidé lui aussi à retrouver Sisdel pour... la faire cracher. Ce scénario pourrait n’être qu’une déclinaison banale d’un thème de Dark Fantasy aux éléments récurrents. Sauf qu’ici, due à deux auteurs danois issus des comics, du cinéma et du jeu vidéo, Aksel Studsgarth au scénario et Daniel Hansen au dessin, Alva dans la nuit, à l’inverse du courant de ce genre, nous plonge dans un décor scandinave de nuit et de froid où il est difficile de se décoller, par la grâce d’un dessin au lavis, très sombre mais en une multitude de nuance de gris, et d’une stylisation rugueuse qui évoque l’expressionnisme allemand des années 20, surtout qu’abondent les pleines pages. Pensons à ce plan d’un noir presque absolu où ne se découpe que la silhouette d’Alva pénétrant chez le receleur par une fenêtre, ou cette chevauchée aérienne avec la sorcière, au sein d’une bourrasque de neige qui réduit le plan à une quasi-abstraction. D’où 265 pages d’action souvent cruelle qui n’excluent pas une certaine poésie de l’absurde presque abstraite qu’on adorerait voir porté au cinéma, pourquoi pas par Roar Uthaug (Glénat).
PETITE HALTE DANS LA ROME ANTIQUE
Le Bouclier d’Achille, si on compte bien, est le 42è « Alix », personnage créé en 1948 par Jacques Martin, qui a assuré seul, jusqu’en 1998, 19 aventures, laissant ensuite le dessin, à cause de problème de vue, à divers collaborateurs, et ce jusqu’ à son décès en 2010. Écrit par Roger Seiter et dessiné par Marc Jailloux, le présent album voit notre toujours jeune héros, accompagné de son toujours fidèle Enak, se lancer à la recherche du bouclier d’Achille, qu’une légende dit caché quelque part après la mort du héros lors de la prise de Troie. Mais son ennemi de toujours, Arbacès, voudrait bien lui aussi mettre la main dessus, moyen pense-t-il pour réunifier les cités grecques afin de déclarer aux colonisateur romains une guerre qu’il espère victorieuse. Beaucoup d’action donc dans cette aventure dont le dessin classique est un peu timide si l’on se réfère au trait de Martin, mais qui se lit avec une pointe de nostalgie. Plus directement historique Le Serment d’Arminius est, lui, le 19è épisode de la série bis « Alix Senator », créée en 2012 hors de l’influence de Martin et où Alix, maintenant âgé de 50 ans, est devenu sénateur sous le règne d’Auguste, qui a remplacé César. Écrit par Valérie Mangin et dessiné par Thierry Démarez, cet épisode se déroule en Germanie, où les légions ont fort affaire avec les tribus celtes, tandis que le jeune Tibère se prépare à prendre la succession d’Auguste. Le trait cinématographique de Démarez évoque, pour les nombreux combats en forêt qui se terminent par la fameuse défaite de Varus, Gladiator, le film de Ridley Scott (Casterman). Et si l’on veut maintenant revenir à la fantaisie la plus débridée, on n’hésitera pas à se plonger dans A principio ad finem, qui fait partie de la série Inguinis (de Katia Even au scénario et Nicolas Guenet au dessin), où la supposée débauche romaine romaine du grande siècle est montrée sans prendre de gant, les amateurs de combat de gladiateurs ayant leur content avec les huit planches furieuses où la sculpturale héroïne Chrysanthe secondée par son vieux mentor affrontent dans l’arène six gladiatrices surarmées. Du sang à la une pour un album qui n’a pas froid aux yeux (Tabou éditions).
UNE BRASSÉE DE ROMANS
Comme nous le faisons régulièrement ici, voici quelques titres à lire, que le manque de place nous oblige à ne citer que brièvement... La Fille du capitaine est le second tome de la saga de L’Arche Spatiale de Peter F. Hamilton, sur le thème du vaisseau-univers à la recherche d’une nouvelle Terre dans lequel, par manque de ressources, les plus de 65 ans sont mis à mort (Bragelonne). Missions stellaires, du prolifique Brandon Sanderson, ici avec Janci Patterson, est le quatrième volume de la série Skyward où, installés sur la planète Détritus depuis des décennies, les derniers survivants de l’espèce humaine tentent de résister aux attaques des Krell (Le Livre de Poche, 790 p.). Pour retrouver l’univers de Dune, sautons sur L’Héritier, second tome de la sous-série “Chroniques de Caladan”, écrits par Brian Herbert, fils de, et Kevin J. Anderson. Enfin pour clore cette excellente brassée de space-opera, Le Chant des Fenjicks, faisons connaissance avec la Française Luce Basseterre, qui renoue avec son précédent La Débusqueuse, dans une transhumance galactique haute en couleurs et espèce bizarres (Le Livre de Poche).
La Fantasy est présente avec la réédition luxueuse du premier tome de la saga Vampyria signée Victor Dixen, La Cour des miracles, qu’accompagne un jeu de tarots (Robert Laffont – « R »). Second sorcier est le tome II de la série Ars Obscura de François Baranger, où l’empereur Napoléon voit ses plans de conquête européenne menacés par des sorciers (Denoël –“Lunes d’encre”). La Confrérie du sang inaugure une nouvelle série L’Ombre des dieux, signée du Britannique John Gwynne (Le Livre des Terres Bannies) où, après la guerre des dieux, les derniers doivent s’unir pour résister aux monstres (Leha). Enfin, Stephen Graham Jones, cet auteur amérindien dont on n’a pas oublié Un bon Indien est un Indien mort, revient à ses frères déshérités, ici une sœurette confrontée à l’horreur, dans le slasher éprouvant Mon cœur est une tronçonneuse ( Rivages/Noir).
LES ENFANTS AUSSI ONT LE DROIT DE LIRE
Le monstre du Loch Ness, La bête du Gévaudan, le Kraken, le Dahu, le Minotaure, la Sirène, le Yéti, la Licorne – voilà quelques-unes de ces bestioles imaginaires, qu’elles soient issues de légende, de la mythologie ou de fausses observations, que Séverine Vidal aborde dans Histoires secrètes d’animaux fantastiques, sous la forme d’un court récit aventureux, suivi d’une remise en perspective plus scientifique. Ceci dans un album de 128 pages (précision : dès 6 ans), que Simon Bailly illustre avec de belle pleines pages style ligne claire à la Hergé (Sens dessus dessous). D’un nombre de pages équivalent mais de très grand format ( 30 x 36) Les 9 Vies extraordinaires de la princesse Gaya fonctionne sur le même principe, puisque voilà neuf histoires de la petite Gaya, morte trop jeune mais qui, grâce à un sortilège revit neuf destinées qui l’entraîne d’époque en époque, de la Chine impériale (Gha Yyan par Alex Cousseau) à la Grèce ottomane (Gaïa, de Thomas Scotto), de l’Amérique des conquistador (Gawa, de Fred Bernard), à la piraterie du XVIIè siècle d’Anne Jonas), neuf récits poétiques par neuf auteurs et autrices superbement illustrés par Régis Lejonc qui, avec deux à quatre pleines pages par histoire, a su adapter son style à chaque décor et époque, tout en gardant la grâce de l’Art déco à la Mucha. Pour jeunes lecteurs ? Sans doute, mais ce vrai livre d’art réjouira tous les âges (Little Urban).
EN ATTENDANT LES PROCHAINES INTERGALACTIQUES
La 12e édition des Intergalactiques de Lyon se déroulera du 18 au 23 avril 2024 sur la thématique sera “Du Pain et des Jeux” qui traitera du sport, de la compétition et du divertissement de masse en science-fiction. En attendant, l’équipe ne chôme pas puisqu’elle vous convie à un exposition consacrée à l'exploration spatiale, au programme : - des gravures originales des années 70 du CERN et le Fermilab sur la compréhension de l'univers ; les créations de Timothée Mathelin (concepteur des affiches du festival) ; la reprise de l'exposition iconographique de Raphaël Colson "En ces terres étrangères ; les peintures grands formats de Tony H. Vernissage Vendredi 6 octobre à partir de 19h à la galerie de Boskop, 60 rue Sébastien Gryphe - Lyon 7e.
Côté théâtre, présentation de Les Voltigeurs de Gy, mis en scène par Marion Talotti, samedi 7 octobre aux Ateliers Presqu’île, Lyon 2e. Parmi le peuple de Gy, seuls quelques individus voient leurs ailes pousser à l’âge adulte. Une malédiction qui en fait des parias… à moins qu’ils ne s’affranchissent des préjugés et décident de voler. Adapté de la nouvelle d’Ursula K. Le Guin, ce récit fantastique riche en émotions visuelles et sonores invite à réfléchir au handicap et au poids du regard d’autrui.
Jean-Pierre ANDREVON