Mon oncle est un anthropophage !
Ma cousine est une sorcière, mon copain est un assassin, mon mari ne bat plus sa femme depuis qu'un fantôme l'a atrocement mutilé. Un mercredi bien agité pour les fans de fantastique.
VOD
UNCLE PECKERHEAD***
USA. 2020. Réal. et scén.: Matthew John Lawrence.(Shadowz)
Judy, bassiste et âme du groupe punk Duh n’a qu’un objectif : jouer sa musique et parvenir à se faire produire. Pour cela, elle ne ménage pas ses efforts et réussit à organiser une petite tournée avec le guitariste et chanteur Max et la batteuse Mel. L’ennui, c’est que le jour J, ils se font enlever leur van faute d’avoir payé les traites. Ils tentent le tout pour le tout et posent des affiches sur les camions du voisinage pour savoir si quelqu’un pourrait leur prêter le temps du voyage. C’est ainsi qu’ils font la connaissance de Peckerhead qui accepte de les conduire. Ils ignorent qu’il est atteint d’un mal étrange qui le transforme en démon anthropophage à minuit… La question de sa présence au sein du groupe ne va donc pas tarder à se poser, car s’il assure ainsi une certaine sécurité, il menace leur vie et risque de les envoyer en prison.
Film réalisé entre amis dans une ambiance que l’on devine excellente, Uncle Peckerhead est un film gore comme on en croise en festival, gore, drôle, irrévérencieux et porté par une bande-son électrisante (composée par Jeff Riddle). Inspiré par l’esprit des productions Troma (on ne peut manquer l’extrait de Toxic Avenger 2), il va jusqu’au bout de son non-sens, enchaînant les situations improbables et les effets gore outranciers, tout en parvenant à donner corps à ses personnages qui se révèlent attachants dans leur quête, non pas de gloire, mais de musique à tout prix. Voilà donc une production indépendante qui mérite d’être découverte, et qui ne perd jamais sa verve et son envie de divertir.
THE OLD WAYS***
USA. 2021. Réal.: Christopher Alender. (Netflix)
Cristina, journaliste américaine, retourne sur les terres de son enfance pour effectuer un reportage sur les tribus locales, mais se rend dans une grotte réputée hantée contre l’avis de sa cousine. Plus tard, elle se réveille et se découvre prisonnière et accusée de porter en elle un terrible démon dont il faut l’exorciser. Malgré ses appels à la raison, personne ne l’écoute, et un terrible chemin de douleur l’attend…
Réalisateur de séries et de courts-métrages, Christopher Alender signe ici son deuxième long, après un essai en demi-teintes en 1999. Il aborde le thème de l’exorcisme sous un jour nouveau, s’éloignant du christianisme pour aller vers le chamanisme, et nous parle de racines et de transmission de la culture. Ce que l’on perd en terreur pure – quelques séquences horrifiques sont là cependant pour assurer le spectacle –, on le gagne en psychologie. Les relations entre les deux cousines éloignées, et entre la journaliste et ses "ravisseurs" nous réservent quelques petits retournements de situation intéressants. Si la fin tire malheureusement un peu en longueur, cela ne remet pas en cause le plaisir globalement ressenti pendant le visionnage de ce petit film efficace.
FIRSTBORN**
(Pirmdizmtais) Lettonie. 2017. (Freaks On)
Alors qu’il rentre d’une soirée avec sa compagne Katrina, Francis, un architecte, est victime d’une agression dans la rue par un motard. Tous deux vont porter plainte, mais restent très marqués par cet épisode violent. Pour essayer de laisser tout cela derrière eux, Francis décide d’aller trouver leur agresseur pour le convaincre de s’excuser auprès de sa femme, mais dans l’altercation qui s’ensuit, le motard fait une mauvaise chute et se fracasse le crâne. Mais comment vivre avec cette culpabilité et avec la jalousie qui le ronge ?
Sur une trame de film de vengeance, Firstborn s’intéresse surtout à la psychologie de son personnage principal, le confrontant, comme celui des Chiens de paille, à la violence ordinaire et à ses conséquences. Si les acteurs sont tous convaincants et si le film nous réserve un retournement de situation en fin de métrage, il peine malgré tout à intéresser sur la durée, tant Francis se montre peu attachant, et tant le scénario favorise le drame sur le spectacle.
Yann Lebecque
FILMS SORTIS
MALIGNANT **
USA. 2020. Réal. James Wan. SORTIE : 1er SEPTEMBRE 2021
Après une entrée en matière aussi énigmatique qu’impressionnante où une force invisible émanant d’une chambre d’hôpital malmène infirmiers et médecins, la directrice énonçant la sentence «Il faut exciser le cancer», nous nous retrouvons classiquement 30 ans plus tard où une trentenaire, Madison, enceinte après trois fausses couches, subit les violence de son mari au point que, blessée à l’arrière du crâne, elle perd connaissance, se réveille à l’hôpital où on lui annonce qu’elle a de nouveau perdu son bébé et que son mari a été retrouvé mort, atrocement mutilé. La suite du film tiendra à l’enquête sur ces meurtres (car il y en aura d’autres – mais qu’est-ce qui les lie ?), dont Madison est le centre, voyant de plus en plus précisément une ombre menaçante se matérialiser près d’elle tandis qu’elle se retrouve – réellement ou en projection astrale ? – sur les lieux des meurtres. Ce nouveau film de James Wan, où le réalisateur rompt provisoirement avec ses Conjuring, fonctionne essentiellement sur le mode policier, Madison étant soupçonnée des massacres par le couple de policier traditionnel style Mulder et Scully, l’inspecteur Saw étant près de croire au surnaturel, son adjointe au contraire restant une matérialiste convaincue. Côté positif, la mise en scène de Wan, qui sait projeter avec astuce son héroïne dans des décors inquiétants, le dispositif de transfert mental par métamorphose de l’image étant très réussi et, pour qui apprécie le gore, quelques séquences terminales particulièrement saignantes quand le monstre se déchaîne. Côté plus négatif, la réédition quelque peu tarabiscotée d’un thème couru qu’on devine très vite (cf. Sœurs de sang de Brian de Palma), incohérences manifestes comprises et, pour ce qui est des acteurs, si la sombre, belle et torturée Annabelle Wallis reste crédible de bout en bout, il n’en est pas de même des seconds rôles, une sœur blondinette qui se sait qu’ouvrir grand les yeux et à la présence inutile, mais surtout un George Young en inspecteur Shaw incolore et dénué de tout charisme. Ces négligences étonnent de la part d’un vieux routier comme James Wan, qui nous donne là une série B néanmoins acceptable en étant pas trop regardant sur les détails.
Jean-Pierre Andrevon
LES ANIMAUX ANONYMES ***
France. 2021. Réal. et scén.: Baptiste Rouveure. SORTIE : 29 SEPTEMBRE
Dans un monde parallèle, les humains sont réduits à l’état de proie par des animaux anthropomorphes. Animaux d’élevage, de chasse ou de distraction, ils errent dans la forêt, guettant chaque seconde l’approche des chasseurs…
Sur un principe d’inversion, Baptiste Rouveure signe une œuvre intéressante, à la limite de la poésie ou du clip vidéo, sans dialogue, et peuplée d’être étranges, têtes d’animaux sur des corps d’humains, et des hommes et des femmes perdus parmi des maîtres qu’ils ne peuvent pas comprendre. Rien ne sera dit des raisons de cette situation, et il faudra tout simplement accepter ce prédicat surréaliste. Le sujet est évident, et aborde le thème de l’exploitation des animaux par l’Homme sous toutes ses formes, en appelant à l’empathie forcément ressentie pour ces victimes sans voix et sans force, totalement dominées et condamnées à une mort certaine. Si l’esprit est assez proche de The Farm de Hans Stjernswärd, l’illustration est nettement moins sanglante, l’horreur se déroulant toujours hors cadre. Pour le reste, c’est une réussite sur le plan visuel, avec une photographie magnifique, créant une atmosphère de fin du monde, voire d’au-delà infernal. Les humains sont souvent cadrés au plus près, soulignant l’appel à leurs sens mis en alerte, ou à leur perte totale de repère. Le montage renforce cette impression d’étrangeté, avec des vignettes de quelques secondes reliées entre elles par des fondus au noir, et baignées de sons inquiétants – cris des animaux, cliquettement des chaînes, grincement des portes et des outils… – très travaillés.
Yann Lebecque