"Holly", le nouveau Stephen King explore les horreurs de l'Amérique de Trump
Ne manquez pas la campagne "Pop Icons-Héros du Metal"
Mötorhead est dans le nouveau "Pop Icons-Héros du Metal"-à commander ici
LA BD EN FÊTE !
Ouverte hier, et poursuivie aujourd’hui, 48H BD est une grande manifestation nationale, dédiée à la bande dessinée sous toutes ses formes, mise en place à l’initiative d’une association composée de 12 éditeurs : Akata, Ankama, Auzou, Bayard, Delcourt, Glénat, Jungle, La Gouttière, Mangetsu, Panini Comics, Soleil et Vents d’Ouest. Animations, dons d’ouvrages, prix de vente découverte, rencontres... Toute une palette d’actions est mise en place afin de célébrer la richesse et la diversité de la BD partout en France et en Belgique. L’association réunit ainsi plus de 300 auteurs au cours d’animations et de rencontres prévues aux quatre coins de la France et de la Belgique avec plus de 1 700 librairies participantes. Voir le programme sur la pièce jointe…
LOUISE BROOKS ET MARLENE DIETRICH SUR LE SET
En juillet 1928, Georg Wilhelm Pabst vient d’achever le tournage de Loulou, avec l’Américaine Louise Brooks, son second film avec elle. Et voilà que débarque sur le set rien moins de Marlène Dietrich, qui reproche au célèbre réalisateur allemand de la négliger. Pabst a alors l’idée, puisque nous sommes au tout début du parlant, de tenter son premier film sonore réunissant les deux vedettes féminines, auxquelles il compte adjoindre une troisième figure, Adélaïde Hall, dite Blackbird, chanteuse et danseuse noire qui se produisait alors au Moulin Rouge à Paris. Pour son projet, au titre de Le Feu et la glace, Pabst s’entoure de Bertold Brecht au scénario, de Kurt Weill pour la musique et du chef-opérateur Sepp Algeier qui, le nazisme venu, tournera mal. Son idée, réaliser le film en une semaine, sur le paquebot Homeric naviguant de Cherbourg à New York. C’est le récit de ce tournage, qui évidemment ne se passera pas tout à fait comme prévu, qui fait l’objet d’un album écrit avec malice par Jean-Luc Cornette qui a su mêler avec art le vrai et le faux (le film Le Feu et la glace n’a jamais existé, on saura pourquoi), s’amusant de la complicité-rivalité entre Brooks et Dietrich, où le sexe a plus que son importance, les deux amies ne se gênant pas pour sauter sur tout ce bouge, homme ou femme, leur bisexualité s’exerçant de la façon la plus guillerette qui soit. Cette très légère uchronie n’aurait pu être qu’une amusette sans le superbe dessin de Jürg qui, sur 75 planches, a su croquer les visages de manière expressionniste (et tant pis si la ressemblance n’y est pas tout à fait), passant des couleurs fanées (bleu-rosé) du réel au gris tramé pour les séquences filmées. Quelques pages terminales redonnent leur vérité cinématographique aux protagonistes de l’histoire sans porter atteinte à un plaisir cinéphilique enchanté (Futuropolis).
JOE HILL ET SES HISTOIRES À FAIRE PEUR
Surtout s’il se met à pleuvoir des glaçons d’un genre bien particuliers, les fulgurites, si aigus que se trouve sous l’averse devient immédiatement semblable à un hérisson — un hérisson mort cela va sans dire. Et des morts, il va vite y en avoir des centaines de milliers. Un phénomène naturel ? Ou la première phase d’un attentat dont les responsables seraient à trouver du côté du Moyen-Orient, et à côté duquel le 11 septembre n’aurait été que broutilles.
Avec un art consommé du suspens et de l’horreur, Joe Hill, en digne fils de son père*, sait mener sa barque, suivant son personnage principal, une jeune lesbienne dont la compagne a été tuée dès la première averse, jusqu’à une conclusion en points de suspension qui laisse agréablement frustré. Mais on se réjouira de lire, concernant un récit écrit en 2016 : « La Russie, à la faveur de ce chaos international, a de son côté attaqué l’Ukraine ». Ce texte fait partie d’un gros recueil de 660 pages (dans sa version poche) comprenant quatre novellas dont Là-haut, qui est également une histoire atmosphérique puisqu’un jeune homme de 23 ans, Aubrey, pour son premier essai de saut en parachute, atterrit sur une sorte de nuage solide et circulaire d’un kilomètre de diamètre. Mais ne serait-ce pas un ovni camouflé ? Là encore, la chute nous laisse dans l’expectative, concernant un récit où, malgré le talent de l’auteur, on a du mal à pénétrer. Nettement plus convaincant est Instantané, sur le thème déjà parcouru ici et là de l’appareil de photo magique qui, ici, mange la mémoire de qui est flashé. Le fait que le personnage témoin soit un pré-adolescent permet aussi à l’auteur de très personnelles et très juste développement sur le difficile passage à l’âge adulte. Chargé enfin est, du lot, le seul récit réaliste où, à travers le personnage peu reluisant d’un ancien militaire, sont clairement mis en accusation le Deuxième amendement et la passion des armes avec le fait que, quand on a tué quelqu’un, pourquoi ne pas continuer ? Au total, une demi-douzaine d’heures de lecture comme on les aime…(Le Livre de poche).
*Stephen King, évidemment
CAZA FAIT À NOUVEAU PARLER DE LUI…
Avec un nouveau recueil de nouvelles de pure SF d’esprit PULP, qui nous entraineront « là où les étoiles brillent comme des diamants sur le velours noir de l’espace » (formule consacrée) et où « …par un étrange phénomène de contamination orthographique, dans tous les récits la concernant, tous les mots formés sur galaxie, perdirent systématiquement leur premier a et ce dans les treize langues de la Confédération Galactique, dite depuis G’lactique ». Un délice à sa manière, format 12,5x21, avec rabats, pelliculage mat, 320 pages, chaque texte illustrés en noir et blanc ou couleurs par la main du maître (Arkuiris).
ÉDITIONS LA VOLTE : UN RECENTRAGE ÉCOLOGIQUE
La Volte annonce son vingtième anniversaire : vingt ans d'aventures éditoriales où se retrouvent des histoires d'émancipation, de la science-fiction sociale et politique, avec une passion pour les jeux de langage. Elle avait déjà annoncé en janvier qu'elle renforcerait cette année son engagement écologique et affirmerait son identité visuelle. En guise de cadeau, La Volte met à l'honneur ses plus belles plumes et ses plus grands ouvrages, à travers ce nouvel écrin, mais portant une attention toujours plus importante aux enjeux écologiques. Par exemple, les formats de La Volte changent pour permettre une optimisation du papier, en un format unique : 14,5 x 21 cm. La couverture sera désormais un papier de création (Rives tradition ou Arena de Fedrigoni en Italie) ne demandant pas de pelliculage plastique. C’est pourquoi nous avons choisi également les papetiers européens les plus transparents sur l’origine du bois utilisé. Les nouvelles éditions d'Hildegarde de Léo Henry, La Horde du Contrevent d'Alain Damasio, et Toxoplasma de Sabrina Calvo, sont d’ores et déjà en librairie, auxquels il faut ajouter la novella de Mélanie Fievet, Koiné, dystopie sur une cité-archipel sortie des eaux il y a 15 ans où, alors que le Chœur raconte l'histoire de cette aventure collective, des voix singulières s’élèvent, fissurant l’harmonie de départ. Bonne renaissance !
L’HOMO ERECTUS A DE BEAUX JOURS DEVANT LUI
C’est le thème de l’album Erectus, qu’Erik Juszezak a traité, d’après le récit de Xavier Müller. Remontant des grands fonds un poulpe porteur d’un virus de rétroaction génétique, le groupe Futurabio déclenche une pandémie, dont le point d’orgue est la transformation des humains contaminée en leur ancêtre apparu en Afrique un millions 900 000 ans plus tôt l’homo erectus. Si la contamination touche aussi certains animaux (des éléphants redevenus gonphoterium où, plus aléatoires des poules transformées en archœptéryx), c’est bien de problème de la prolifération d’Erectus que se mobilise le monde entier, avec en premier plan la personne de la biologiste Anna Muller, enceinte de son fiancé lui-même transmuté. Si l’idée est intéressante, le traitement par contre est assez routinier sur les quelques 100 pages, qui coche sagement toutes les cases du thème, recherche d’un vaccin, mise en cause du laboratoire coupable, chasse aux érectus qui manque bien se faire massacrer jusqu’aux derniers, si la solution n’étais pas de les déporter dans une réserve ménagé entre le Soudan et le Kenya, en somme un retour aux sources. On tiquera quand même quant à l’affirmation que tout ce qui nous est raconté «est susceptible de se produire un jour» (Phileas).
LES VILLES ET LES ARTS
• Le recueil Les Arts dans les villes du futur, anthologie réunie par Émilie Chevallier Moreux et publié dans le cadre du Prix « Écrire la Ville des nouvelles », seconde édition, réunit 15 textes sur la présence de différentes disciplines artistiques, et leur utilité pour changer la vie d’une cité. Issu d’un concours, le premier prix a été attribué à Philippe Caza pour Muse, balade poétique d’une jeune fille dans les ruines d’Avignon après l’effondrement des villes suite à la «Grande Bistouille» (Arkuiris).
Jean-Pierre Andrevon
HOLLY, DE L’HORREUR À DÉVORER SANS FAIM
Dernier opus en date de Stephen King paru sous nos latitudes, ‘’Holly’’ et ses plus de 500 pages écrites au présent nous entrainent à la poursuite du Mal à visage humain dans ce qu’il peut avoir de plus « prosaïque et extravagant » comme le définit lui-même l’auteur de ‘’Misery’’. Auquel il emprunte du reste certaines caractéristiques puisqu’il est ici également question de séquestration, mais pour des motifs assez différents de ceux qui poussaient l’infirmière Annie Wilkes à confiner en sa demeure l’écrivain Paul Sheldon. Faisant de la détective privée Holly Gibney apparue dans ‘’Mr Mercedes’’ le fil conducteur de cette enquête hors norme se déroulant en 2021, King profite de son polar horrifiant pour brosser le portrait d’une Amérique aux prises avec la pandémie de Covid et de manière sous-jacente pour brocarder les partisans de Donald Trump rêvant de voir revenir au pouvoir leur leader déchu. Tentant de retrouver la trace d’une jeune femme disparue sans crier gare, Holly finit par découvrir qu’elle n’est pas la seule à s’être ainsi volatilisée comme si quelque force mystérieuse s’était emparée d’elle et de ses compagnons d’infortune dans un périmètre fort circonscrit. Prenant le parti de nous dévoiler assez tôt dans le récit l’identité du tandem à l’origine de ces rapts, King s’y entend pour décrire par le menu les mobiles d’un couple haut en couleur, follement dérangé au point de se comporter tel un redoutable ogre à deux têtes. Pour un conte de fées moderne qui stigmatise au passage racisme, homophobie et délires complotistes, aussi résolument combattus par son attachante héroïne que la démente théorie à l’œuvre criminelle scandant l’intrigue. Moins roi de la terreur que tout simplement littérateur hors pair, le King nous gratifie là encore d’une œuvre diaboliquement bien troussée, aussi haletante que pétrie d’empathie envers les victimes de tous les Jekyll & Hyde de la terre (Albin Michel).
Sébastien Socias