Dernier weekend irrévocable pour la campagne de notre hors série H.P.Lovecraft
Laissez-vous encore une fois dominer par "Vampirella".
Dernier weekend irrévocable de la campagne
VAMPIRELLA EN GRANDE(S) FORMES(S)
Voilà une héroïne qui, née en 1969 dans le magazine du même nom, publié par Warren dans la continuité de Creepy et Eerie, a fait coulé beaucoup d’encre et provoqué certains émois grâce à l’érotisation d’un personnage toujours (dé)vêtue du stricte minimum vital… Comme le souligne David A. Roach dans l’abondante préface du tome 2 de ses aventures, Warren « a conçu cette série comme une parfaite synthèse de l’horreur et du glamour, deux composantes susceptibles de plaire à son lectorat principal : les adolescents ». Et qu’on va retrouver ce volume, qui regroupe 22 histoires de sa période la plus faste, 1972 et 73, écrites par nombre de scénaristes, dont Archie Goodwin, qui sut donner sa personnalité définitive à cette belle vampirette au visage copié sur une de ces belles actrices italiennes des années 60 comme Ornella Muti, et dessinée en majorité par le très expressif José Gonzalez, un maître du noir et blanc. Si l’on peut rapidement oublier que l’héroïne vient de la planète Drakulon, qu’elle a quitté après la désertification de son monde d’origine, simple prétexte, on ne s’étonnera pas de la voir ensuite faire alliance avec un certain Van Helsing pour se confronter avec Dracula lui-même. Dans ce copieux album de 272 pages, Vampirella n’a pas toujours le premier rôle, parfois même est-elle absente, laissant la place à une de ses doubles, comme dans Cilia (Félix Mas au dessin), laquelle n’est autre qu’une sirène. L’essentiel étant qu’on s’amuse bien, fût-ce au second degré (Delirium).
RETOUR AU CYCLE DE HAIN
Inutile de présent Ursula Le Guin, une très grande de la sf américaine disparue en 2018, connue surtout par le Cycle de l’Ekumen, ou cycle de Hain, fondé sur l’existence de la civilisation originaire de la planète Hain qui, après s'être quasi auto-détruite, s’est lancée dans l’espace. Cet ensemble, où l’engagement féministe de l’autrices est plus présent que jamais, vient d’être rassemblé en deux épais volumes au totalisant plus 2700 pages et titrés Le Livre de Hain, l'intégrale du cycle comprenant bien sûr ses deux romans les plus fameux, La Main gauche de la nuit et Le nom du monde est forêt, avec des inédits et introduit par l'autrice elle-même. Un must à ne pas manquer (Le Livre de poche).
GARE AU MEGALODON !
Plus personne n’ignore ce qu’est un Megalodon, ce requin primitif pouvant atteindre jusqu’ à 14 m de long et qui hantait les océans du Miocène il y a 20 millions d’années. Nombre de films (en dernier : En eaux très troubles) s’en sont servi pour nous terrifier et, en BD, Christophe Bec en a fait la vedette de sa série Carthago. Apparemment pas encore satisfait, notre très prolifique scénariste a remis en piste sa créature dans Megalodon, mettant en scène un jeune de son espèce qui veut se tailler une place dans sa meute en combattant son mâle alpha, le « Balafré », affrontant ensuite un coriace livyathan, ancêtre du cachalot, de peu probables dauphins à bec effilés, un encore moins réaliste sarcosuchus, crocodile géant vivant au Crétacé, et plutôt en Afrique centrale que dans les fonds marins, pour finir dans la gueule d’une sorte de serpent de mer, lui tout à fait imaginaire. On ne doute pas que Bec a ainsi voulu nous proposer une sorte de documentaire-fiction où l’homme est bien entendu absent, et qui serait l’équivalent en BD de ces nombreux téléfilms faisant revivre les créatures préhistoriques. Mais alors pourquoi, dans les 15 dernières planches d’un album qui en compte 99, nous transférer il y a 20 000 ans, avec des homo sapiens s’exprimant comme en 2023, et pagayant dans une mer glaciaire d’où surgit notre Mégalodon, censément éteint depuis plus de deux millions d’années ? Heureusement, ce scénario écrit, gageons-le, en une petite après-midi, donne lieu à une exploitation graphique somptueuse, signée Paolo Antiga pour le dessin et Andrea Méloni pour la couleur, avec toute une gamme de bleus attaquées par de continues efflorescences de sang quand de plus petits sont dévorés vif par de
plus gros, livrée en pleines pages, parfois en doubles-pages d’un impressionnant effet de relief organisant un ballet sous-marin d’une fascinante cruauté. Tout pour les yeux, rien que pour les yeux (Les humanoïdes Associés).
UN NOUVEAU “CONTACT”
Un des thèmes les plus fascinants qui soient en sf est le premier contact avec une autre civilisation venue nous rendre visite – et ce n’est pas Denis Villeneuve qui dirait le contraire. Avec Attraction (attention, un double sens est à l’affut dans ce titre), Jerry Frissen, rédacteur en chef de Métal Urlant au scénario et Roberto Zaghi au dessin nous en offre une version plus classique, la station spatiale américaine Horizon étant abordé par le gigantesque polyèdre obscur des Eo’Tark, espèce capable de traverser l’espace comme le temps en suivant des canaux quantiques. Le contact est beaucoup plus facile que supposé, les Aliens se montrant des humanoïdes presque semblables aux humains, le linguiste Danko Orton nouant qui plus est une relation des plus personnelles avec son homologue Eo’Tark No’ Mi, qui se termine en s’envoyant littéralement en l’air, la jeune Alien tombant qui plus est enceinte du Terrien. Cette histoire spatiale fleur bleue, certes bien naïve mais ne se terminant néanmoins pas en happy end et mettant en cause l’imbécilité des militaires et le racisme, prend son temps (112 pages) pour nous transporter à travers la galaxie dans de belles planches enluminées par les couleurs d’Ive Svorcina (Les Humanoïdes associés).
BUFFY REVISITÉE
Riche de 144 épisodes diffusées en 7 saisons, sans compter un spin off, la série Buffy contre les vampires, créée par Joss Whedon et interprétée par la délicieuse Sarah Michelle Gellar, arrêtée en mai 2003, valait bien qu’on célèbre le vingtième anniversaire de sa disparition. Ce dont s’est chargée Fabien Clavel, dont on connait la passion pour le fantastique et la fantasy, dans Buffy, baroque épopée, dont la conclusion a pour titre « La Meilleure série du monde ? », l’auteur avouant « J’ai adoré écrire sur Buffy », se permettant même d’interpeller ses lecteurs et lectrices en les tutoyant au détour d’une phrase. Mais qu’on ne croie surtout pas aux délires d’un geek, Clavel, au long des 230 pages de son ouvrage, étudiant en profondeur une série qui « raconte comment une Tueuse parvient à s’opposer à un pouvoir ancien et dépassé qu’elle finit par supplanter en proposant un nouvel ordre du monde ». Fantastique, sf, baroque, histoire de super-héroïne, Buffy n’en présente pas moins un succès paradoxal, où les incrédules s’offusquent d’y voir «une petite blonde qui tue des vampires, des démons, qui pratique les arts martiaux, des maquillages improbables, des décors en carton pâte… » Comment l’auteur balaye ces arguments pour en faire une richesse, voilà qui est à trouver dans une étude passionnante, qui se lit comme un roman et donne envie de revoir… mais vous avez compris (Mnémos).
CAZA CHEZ L’OURS
C’est dans sa collection Kraft, couverture dudit papier, que Philippe Caza a trouvé refuge chez l’Ours pour les 40 pages que comptent Les Jours et les nuits de Lola Lokidor & Rufus Tucru, courts récits comme on s’en doute satyriques tombés de la plume jamais en repos de Caza, qui réunit ici les textes courts mettant en scène une héroïne et un héros faisant partie de sa veine « potache et nichons ». Publié bien sûr chez l’Ours, dont on rappelle une nouvelle fois le contact (ours.editions@protonmail.com) qui édite en même temps deux jolis petits annuaires 2024.
LA BANDE DESINÉE À SAINT-MALO
Le 42e festival de la bande dessinée et de l’image projetée se tient à Saint-Malo du 27 au 29 octobre au Palais du Grande Large, quai St Malo de 9h30 à 19h. 700 auteurs sont attendus (Titeuf, Baudoin, Boucq, Dorisson, Goossens, Rossi), avec150 stands, de nombreux éditeurs de BD, dont les Humanoïdes associés, présent avec leurs auteurs, Comics, Manga, BD indé, Objets et Tirages de collection. Pour la première fois, le festival, consacre une partie de son salon du livre à la culture manga. Parmi les 8 éditeurs choisis par le festival, on retrouvera dans cet espace des maisons d’édition emblématiques telles que : Kana, Pika ou Ankama.
LA SF AUX UPOPIALES DE NANTES
Du 1er au 5 novembre se tiendra la 24ème édition des Utopiales de Nante, mettant en lumière l'influence de la science-fiction dans le processus de transmission. L'événement s'interroge sur la notion d'héritage, qu'il soit accepté ou légué, et sur la manière dont ces transmissions façonnent ou remodèlent la société. Chaque année, le thème choisi initie des dialogues entre littérature, sciences, cinéma, arts graphiques, offrant une réflexion sur notre histoire, notre actualité et notre devenir. Au fil des ans, le festival a présenté plus de 1167 films, accueilli 2730 artistes et chercheurs et exposé près de 179 œuvres artistiques. Cette approche holistique a positionné les Utopiales comme un événement incontournable de la science-fiction, attirant plus d'un million de visiteurs. Cette édition 2023 promet des rencontres littéraires, artistiques et scientifiques, des projections, des expositions et des jeux. Elle introduira également des nouveautés telles qu'une journée festive, des ateliers futuristes, des événements au nouveau café de La Cité, une zone pour la jeunesse. et plus encore. La billetterie est ouverte depuis la conférence de presse le 12 octobre annonçant le Prix Utopiales 2023.
JEAN-PIERRE ANDEVON