Dernier weekend de la campagne Tolkien Pop Icons
Les Intergalactiques reviennent à Lyon fin Avril 2025
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LES SECRETS DE BELZAGOR
Dans le roman de Robert Silverberg Les Profondeurs de la Terre (1970) un fonctionnaire colonial, Edlund Gundersen, revient sur la planète Belzagor, devenue autonome après un processus de décolonisation, et que se partagent deux espèces dominantes, les Vildoror, semblables à des éléphants, et les Sulidoror, sorte d’humanoïdes simiesques hauts de 3 m. Le but de Gundersen est de percer l’énigme de la cérémonie de la Renaissance, en principe interdite aux humains de la Terre et suscitée par une énergie cachée aux confins du monde, le Gra’khle, où peut être caché le secret l’immortalité. Mais Gundersen doit compter sur son chef Kurtz, un nom qui n'est pas dû au hasard, lequel exploite à son propre compte le venin d’immenses serpents, les Naggiars. Modèle de planet opera mêlant l’écologie d’un monde étranger grouillant de créatures bizarres et dangereuses et un mysticisme familier à l’auteur du Château de lord Valentin, le roman a été adapté de manière plutôt fidèle en 2017 par Philippe Thirault au scénario pour des dessins de Laura Euccheri en deux albums titrés Retour sur Belzagor. Puis, en 2022 et 2023, signée Sam Nivel et Bruno Lecigne au scénario avec Adrien Villesange à la plume (et Alexandre Boucq au pinceau), est produite une suite inédite en deux nouveaux albums au titre générique de Les Enfants de Belzagor, qui éclaire ce que Silverberg avait laissé dans l’obscurité, le mystère de la Renaissance étant enfin révélée. Ce sont ces quatre tomes qui sont aujourd’hui réunis en une intégrale de 220 pages, comprenant sur 14 d’entre elles les croquis des deux artistes concernant les créatures de Belzagor, toutes très réussies, en particulier les éléphantesques mais jamais ridicules Vildoror. Outre qu’on doit se féliciter de voir enfin ressourcé un des meilleurs auteurs de SF américain jusque-là scandaleusement ignoré et par les comics et par le cinéma, on ne peut qu’en apprécier le résultat, tant par l’imagerie classique mais efficace des deux graphiste (les étendues glaciaires de Villesange en imposent particulièrement, une appréciable touche à la Stefan Wul baignant l’ensemble), que par la manière dont les scénaristes successifs ont su s’emparer d’un matériau silverbergien pas facile à manier (Les Humanoïdes associés).
ET LA NUIT NOUS EMPORTERA
À Lvylin, une ville imaginaire d’Europe centrale qui fait tout de même beaucoup penser à Prague, les citoyens vivent sous le régime d’un couvre-feu si ancien que la plupart en a oublié l’origine et surtout les raisons, que des miliciens en capote beige à boutons dorés font respecter de manière stricte. Et quand la sirène retentit, inutile de vouloir se rebeller. Un spectacle sera interrompu dans la minute, un couple en pleine action n’a plus qu’à se séparer et rentrer maison. Avec La Nuit dans leurs yeux, Pascal Malosse, adepte du fantastique en demi-teinte ne se dépare pas, après Musée noir et Le Bagne de feu, de son art de l’ambiance brumeuse et de ses descriptions prenantes de certaines ruelles ténébreuses qu’il doit à son maître Jean Ray. Car ici, ce ne sont pas tant les personnages qui importent, comme le vieil acteur Lazlo Gombrowski séparé de son actrice Slava, où le jeune soldat Lukasz dont le compagnon Aleks s’est brusquement évaporé, que ce lent engloutissement dans un cauchemar fiévreux où nombre de personnages son effacés. Dystopie, alors ? Sans doute aimerait-on en savoir un peu plus sur cette société donnée sans explication, même si l’empreinte de la grisaille des pays l’Est au temps du rideau de fer y est bien perceptible, mais ce n’est apparemment pas le chemin qu’a voulu prendre l’auteur qui a préféré nous laisser en plan dans son mystère poisseux (La Clef d’Argent).
NOUVEL ÉDITEUR, NOUVEAUX LIVRES
«Publier peu, mais publier bien» : telle est l’ambition des éditions Conséquences. Créée en début d’année par les éditrices Zoé Laboret et Gaëlle Giroulet, la maison publiera des textes majoritairement francophones, appartenant au genre de l’imaginaire. Pour ce faire, les associées ont lancé deux collections. La première, baptisée Augures, s’adressera aux adultes, les jeunes lecteurs et lectrices devant trouver leur bonheur avec Voraces.
Avec un maximum de dix publications par an, les éditrices caractérisent ainsi leur projet : «Notre ligne édito s’articule exclusivement autour de coups de cœur, de romans abritant des figures fortes, de personnages impossibles à oublier, qui donnent envie de rester entre les pages du livre».
Ouvertement engagées en faveur des communautés LGBTQIA+ et de thématiques telles que la santé mentale, le validisme, ou l’écologie. Pour inaugurer la maison d’édition, deux titres sont prévus en juin grâce à une campagne de financement participatif sur Ulule. Nous sommes l’apocalypse, de l’auteur trans originaire de Virginie Andrew Joseph White, intégrera la collection destinée aux jeunes adultes. Dans ce roman, l’écrivain embarque ses lecteurs et lectrices aux États-Unis, où un culte évangéliste radical a propagé à l’échelle mondiale un virus mortel d’une puissance inédite. Benji, un adolescent transgenre de seize ans, tente de fuir cette secte avec son père… avant de devoir poursuivre seul. Le deuxième ouvrage s’adresse lui aussi à un lectorat de jeunes adultes. Intitulé L’Empreinte du démon et signé par la bibliothécaire Nadège Da Rocha, il y est question d’une nonne un peu spéciale chargée de traquer les démons, il raconte les débuts d’Aster, une nonne-guerrière au service du royaume. Nous ne manquerons pas de parler plus en détail de ces deux ouvrages, et des suivants, quand ils nous parviendront…
DU CINÉMA PLEIN LES PAGES
La Divine Comédie, poème de Dante Alighieri rédigé entre 1303 et 1321 et divisé en trois parties Inferno (Enfer), Purgatorio (Purgatoire) et Paradiso a tenté à maintes reprises le cinéma, tout particulièrement sa première partie à cause des images suscitées et qu’avant le 7e Art Gustave Doré a magnifiquement illustré par ses gravures. C’est ce que retrace Paolo Speranza Speranza (professeur de Littérature et critique de cinéma pour Cinemasud ainsi que la collection Quaderni di Cinemasud), dans l’ouvrage Dante et le cinéma, qui retrace plus d’un siècle d’adaptations cinématographiques inspirées de la vie et des œuvres du poète florentin, depuis les premières productions du cinéma muet – Francesca da Rimini, or the two Brothers de James Stuart Blackton, 1906, qui révéla Florence Turner dans le rôle principal – jusqu’aux interprétations contemporaines – dernier en date : In Viaggio con Dante de Lamberto Lambertini, 2018). Dante a nourri l’imaginaire des cinéastes bien au-delà de la Divine Comédie, son influence s’étend à un large éventail de films, de l’Italie aux États-Unis, en passant par la France et l’Allemagne. L’ouvrage analyse notamment les nombreuses transpositions cinématographiques de l'Enfer et des visions de l’Au-delà, les figures féminines marquantes de son œuvre, ainsi que les projets ambitieux jamais réalisés, y compris ceux rêvés par Pasolini et Fellini, sans oublier les films définitivement perdus, et attendant celui de Julian Schnabel avec Johnny Depp. Soit 32 longs métrages de fiction au total, où sont particulièrement mis en valeur Inferno d’Adolfo Padovan, Francesco Bertolini et Giuseppe De Liguoro en 1911, aux décors inspirés de Doré et, toujours en Italie, Maciste aux Enfers de Guido Brignone en 1925, que suivra la version de Ricardo Freda en 1962. Richement illustré sur ses 230 pages par plus de 500 reproductions, photogrammes et affiches originelles, ce premier ouvrage sur le sujet publié en France l’ouvrage est à découvrir absolument, ce serait-ce que pour retrouver le chantre de l’amour et la mort et le déchirement romantique entre l’expression individuelle et l’oppression sociale (Grenelle).
C’est au contraire un album très généraliste qu’est celui de Ian Haydn Smith simplement titré Cinéma, et qui se veut une chronologie thématique du 7e art, et même avant puisque ses premières pages commencent avec le praxinoscope de Charles-Émile Raynaud, le zoonostrope tourant du britannique Horner ou le vitoscope d’Edison jusqu’à… tout ce que vous connaissez aujourd’hui, SF et blockbuster n’étant pas oubliés, témoin de couverture de ce très bel ouvrage de 230 pages, comme on dit richement illustrés de photogrammes souvent inédits, et qu’on ne peut que recommander, car il y a toujours des choses à apprendre (Du May).
LES INTERGALACTIQUES DÉBARQUENT À LYON
Créé en 2012, Les Intergalactiques est un festival lyonnais unique en son genre. À la croisée de la science-fiction, des littératures de l’imaginaire, des sciences humaines et de la pop culture, il s’impose comme un temps fort de réflexion, de création et de transmission. Organisé par l’association AOA Prod, le festival explore chaque année une grande thématique contemporaine à travers une programmation dense mêlant projections de films, tables rondes, conférences, expositions, salons, performances et ateliers. En croisant fictions de l’imaginaire et sciences sociales, nous nous interrogerons sur nos leviers d’action face à une situation politique, écologique, sociale... qui nous laisse de plus en plus, individuellement et collectivement, avec un sentiment d’impuissance. Ouvert ces 25, 26 et 27 avril, le festival à rencontrer cette année un grand nombre d’invité·es et d’intervenant·es lors de plusieurs cycles de tables rondes et d’ateliers, avec Sabrina Calvo, Léo Henry, Christian Léourier, Jean-Marc Ligny, Ketty Stewart et bien d’autres, sans oublier des soirées de lecture musicale, comme celle Edward Norton le samedi 26, une foire aux livres, des jeux de rôles, et une riche programmation cinéma déjà en cours mais où nous pouvons citer Wall-e (Mercredi 23 avril) ou Pink Floyd : the Wall (Jeudi 24 avril), au Ciné Lumière Bellecour (Lyon 2e).
MJC Monplaisir, 25 avenue des frères Lumière, 69008 Lyon, et pour tous renseignements :
Jean-Pierre ANDREVON