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L’UNIVERS DES COMICS
Qui a connu le magazine Comic Box, créé en 1998 et première revue française à étudier le phénomène et l’actualité des comics ? Morte en 2007 après un 104e numéro, la voilà qui ressuscite aujourd’hui à travers les 216 pages d’un album qui en compresse les meilleurs articles, accompagnés d’un grand nombres d’illustrations parfois pleines pages, un ensemble qui surprendra bien des amateurs car, axé, et c’est le sous-titre de l’ouvrage, sur Les Multivers, l’ère des super-héros alternatifs, il nous fait connaître de multiples séries et créateurs dont la diffusion a été restreinte, voire n’ont pas encore connu de traduction française, comme le canadien Jeff Lemire, auteur de Black Hammer et Animal Man. Plusieurs longs interviews, dont celles de deux très grands, tous deux disparus cette année, George Pérez (Wonder Woman, Avengers) et Neal Adams viennent utilement nous plonger dans l’univers de ces deux titans. Un glossaire et une liste des albums indispensables complètent une somme impressionnante. Pour les amateurs ? Pas que. (Huginn & Muninn).
LES MONDES PERDUS SELON GÉRARD ESCOLANO
Nous parlons régulièrement ici du travail exceptionnel de l’auteur-éditeur Gérard Escolano, qui fabrique en solo de magnifiques albums sur les genres cinématographiques que nous apprécions et défendons, sa précédente création étant une somme inégalée sur le Serial, en huit volumes totalisant plus de 3000 pages et dix fois plus d’illustrations. Il nous revient aujourd’hui, plus modestement mais aussi passionnant, avec Les Fantastiques Mondes perdu
s et Civilisations oubliées, 337 pages selon sa méthode vivement colorées, et où se bousculent les illustrations de divers formats, essentiellement des photos de films et des affiches de toutes nationalités. Selon le plan de l’ouvrage, on y visitera le centre de la Terre, l’Atlantide, le triangle des Bermudes, les Amazones, les mondes dinosauriens et bien d’autres ainsi que les filmograhies complètes des réalisateur ou auteurs s’étant particulièrement attachés au sujet, H. Rider Haggard, Kevin Connor, Irvin Allen entre autres. On fera connaissance avec certaines créatures des plus bizarres du nom de Ahool, Almasty, Barmano, Black Shuck, Chupacabra et ainsi de suite jusqu’au Yéti, on parcourra les pages consacrées au monstre du Loch Ness, du Mokele-mbenbe ou du Kraken, dont notre auteur feint de croire qu’ils pourraient peut-être exister. Bref, s’instruire en s’amusant, tel est le maître-mot d’un monument qu’on peut approcher en contactant son architecte à gerard.escolano@numericable.com ou en allant flâner sur son site, fantasfilm.org.
DEUX PRIX POUR LA SF FRANÇAISE
La 23ème édition du Festival International de Science-Fiction Les Utopiales se tiendra du 29 octobre au 1er novembre 2022, et a cette année pour thème «Limite(s)». À cette occasion, sera décernée la double récompense des Éditions Scrineo aux Utopiales 2022 : Floriane Soulas, lauréate du Prix Utopiales 2022, pour Les Oubliés de l’Amas et Daniel Mat, lauréat du Prix Utopiales Jeunesse 2022 pour Le Troisième exode. Floriane Soulas sera l’invitée de France culture, partenaire officiel du festival, pour l’émission « Bienvenue au club » le Samedi 29 octobre avec son roman : L’humanité a colonisé tout le système solaire mais une planète reste inatteignable, Jupiter, l’étoile ratée. Au cours des siècles, les vaisseaux ayant échoué à percer ses défenses ont fini par créer un gigantesque nuage de débris, sur laquelle s’est construit au fil des années l’Amas, un bidonville flottant. Fraîchement débarquée, Kat a très vite intégré une équipe de recycleurs dans un but précis : intégrer le circuit des courses de vaisseaux illégales pour retrouver son frère disparu.
Quant à Daniel Mat, Le Troisième exode, voit l’essentiel de l’humanité quitter la Terre guidée par un réseau d’intelligences artificielles surpuissantes. Un siècle plus tard, les oubliés ont repris une vie normale, mais se questionnent encore sur le destin des voyageurs qui ne sont jamais revenu les chercher. Ezra, un jeune orphelin, souhaite quitter sa ville dans laquelle il ne trouve pas sa place. Dans ce but, il parcourt quotidiennement les ruines d’une ancienne cité afin d’en ramener des objets à réparer puis à revendre, espérant avoir bientôt les moyens de ses ambitions.Un jour, il découvre une tablette électronique de l’ancien monde que seule son amie Céleste, une jeune fille surprotégée par ses parents, semble pouvoir activer. Ils font ainsi la connaissance de Tera, une intelligence artificielle abandonnée qui ne se souvient pas pourquoi les siens l’ont laissé sur Terre. Peut-être pour guider ce qu’il reste de l’humanité ?
UN RETOUR À SIR ARTHUR CONAN DOYLE
Que fait-on lorsqu’on lit ceci : « On ne pourra peut-être jamais formuler un jugement définitif et absolu sur ce qui s’est passé entre Edward Bellingham er William Monlhouse Lee, et sur la cause de la grande frayeur d’Abercombrie Smith » ? On se hâte de lire le texte introduit par cette phrase, soit Le Lot n° 249, longue nouvelle dont la première édition remonte à 1892 et signée par un certain Arthur Conan Doyle, qui ne fut pas seulement le créateur de Sherlock Holmes et l’auteur du Monde perdu mais, outre ses romans historiques, parsema sa carrière de nouvelles fantastiques brassant tous ses grands thèmes, que Francis Lacassin énumère ainsi : « nécromancie, monstres, cauchemars, rétrocognition, visions, réincarnation, fantômes, alchimie, spiritisme, phénomènes parapsychologistes, les traitant de toutes les façons possibles ». Dans le volume présenté par François Angelier, Mystères inexpliqués, en voici huit, écrites entre 1883 et 1913, qui ont pour la plupart comme personnages de dignes étudiants d’Oxford à qui il arrive pis que pendre, comme au pauvre John Barrigton Cowles qui ne sait pas que la très belle femme qu’il doit épouser habite la nouvelle titrée Les Trois fiancés morts. Chez Doyle, la peur est toujours feutrée, surgissant du quotidien le plus banal, sauf lorsqu’il se hasarde dans la science-fiction, ainsi du plus connu L’Horreur des altitudes, où « les hautes régions de l’air ont-elles aussi leurs jungles, que hantent des créatures pires des tigres », un texte qui semble bien avoir été inspiré à l’auteur par Le Péril bleu de Maurice Renard. Quant au Lot 249, qu’on découvre dans la plus caractéristique et la meilleure nouvelle de l’ensemble, nous nous garderons bien de dévoiler ici de quoi il s’agit, pour ne pas gâcher le plaisir d’une lecture garantie purs frissons (Dargaud/Fantask).
L’ABATTOIR DE KURT VONNEGUT
Qui a écrit, en exergue à son roman ? : « L’atrocité de Dresde, horriblement coûteuse et méticuleusement planifiée, fut si absurde qu’une seule personne sur Terre en tira un quelconque profit. Cette personne, c’est moi. J’ai écrit ce livre, qui m’a rapporté beaucoup d’argent et a fait ma réputation. Je me suis débrouillé pour que chaque personne tuée me fasse gagner deux ou trois dollars. C’est un métier ». Kurt Vonnegut, bien sûr, pour son roman Abattoir 5, dont il faut espérer que tous et toutes ici l’ait lu – sinon c’est un oubli à réparer d’urgence. G.I. pendant la dernière guerre, Vonnegut était à Dresde, prisonnier des Allemands, alors qu’entre le 13 et le 15 février 1945, la ville fut bombardée de manière totalement gratuite par l’aviation alliée, ce qui se soldats par 25 000 morts civiles. L’auteur, délivré, put ensuite assister à l’exécution d’un camarade, fusillé pour pillage alors qu’il avait simplement récupéré une théière dans les ruines. Ce sont ces deux expériences qui l’ont poussé à écrire son œuvre la plus célèbre et la plus féroce, cet Abattoir 5, du nom du lieu où il était retenu en captivité, mettant en scène son double, Billy Pilgrim, qui sera enlevé par des extraterrestres pour être présenté dans un zoo galactique en compagnie d’une certaine Montana Patachon avec qui il sera prié de se reproduire en public. C’est ce récit aussi tragique qu’hilarant qui est aujourd’hui traduit très fidèlement en BD par Ryan North, dans un épais volume de 192 pages, dont le dessin classique mais très précis d’Albert Monteys rend toute la richesse, il n’est qu’à voir la mise en perspective, sur deux doubles pages, de Dresde paisible et ce qu’il en reste après le passage des bombardiers anglo-saxons. Un choc, une merveille (Seuil).
Jean-Pierre ANDREVON