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LE NOUVEAU MÉTAL HURLANT
Toujours fidèle à sa parution trimestrielle, voilà cette semaine le n° 5 du nouveau Métal hurlant, qui annonce comme thème global : Métavers : les émotions synthétiques. Que commence ainsi dans son édito le rédacteur en chef Jerry Frissen : « L’idée d’un métavers, un nouveau monde, qui ne serait rien d’autre que le nôtre dont la réalité aurait été augmentée, un endroit absurde, une caricature pseudo-capitaliste où il faudra payer pour acheter sa place de néant est terriblement déprimante. Pourquoi allons-nous nous imposer cette abomination quand des créateurs de toutes sortes inventent d’autres mondes depuis des millénaires ? » D’où pas moins de 25 nouvelles exploitant le thème, où l’on retrouve le facétieux Lewis Trondheim (La Douche éternelle), le Russe Nikola Piserev et son très esthétique Black Box, le science-fictionnel Richard Guérineau et sa planète sui n’existe pas, ou encore Afil Khaled qui revisite les geôles stalinienne sur un scénario de Laurent Genefort. Donc à boire et à manger serré dans 270 pages qui parfois donnent l’impression que le thème entraine certaines redites. Des articles (Bruno Lecigne), des entretiens (Jeremy Perrodeau, spécialiste du sujet) accompagnent ce mook introduite par une couverture de Bilal (Les Humanoïdes Associés).
L’ALBUM (DOUBLE) DE LA SEMAINE
Déplacement [deplasma] 1 se situe dans un futur proche où la Terre est surpeuplée et ses ressources s’épuisent rapidement. La navette spatiale Dawn Aquila est développée afin de permettre à une petite équipe de lancer la colonisation
d’une planète habitable dans un système planétaire proche. La navette transportera également un « portail » qui permettra de voyager instantannément de l’ancienne Terre jusqu’à ce nouvel Eden. Parallèlement à la mise en place de ce projet, Internet a connu de profonds bouleversements et est désormais accessible télépathiquement par les 2/3 de la population mondiale, grâce à un serveur central. Mais peu avant le début du récit, la population terrestre, horrifiée, apprend que ce « serveur » est en fait un enfant. Joshua Cotter, natif du Missouri en 1977, commence en 2000 à publier des mini-comics, avec de créer un fanzine pour y publier Gratte-ciel du Midwest qui remporte l’Isotope Award. Un second volume, [deplasma] 2 suit, où Internet, rebaptisé le « flux », fonctionne par télépathie avec pour serveur central une petite fille. 240 pages pour le premier tome, 368 pour le second, ce qui n’est qu’un début pour une série qui devrait compter sept volumes. Finement dessiné, noir et blanc, comptant des milliers de petites cases rigoureusement alignés, ce récit où William Gibson n’est pas si loin demande certes un effort pour y pénétrer et s’y tenir, mais la patience peut être récompensée. (Ça et là).
UNE MERVEILLE DE POÉSIE GRAPHIQUE
Le poète Qaïs et la belle Leïlli sont éperdument amoureux. Mais le père de la jeune femme refuse de donner la main de sa fille à ce vagabond, qui n’a plus qu’à fuir, chantant son amour perdu par monts et par vaux, celui qu’on appelle désormais Majnoun, le fou amoureux, apaisant par ses vers les animaux les plus féroces tandis que Leïli attend désespérément son retour. Adaptant à sa manière ce vieux conte oriental, persan notamment, Yann Damezin, pour l’album Majnoun et Leïli, chants d’outre-tombe, est allé jusqu’à adapter le texte en alexandrins qui coulent de source :
Leurs âmes transpercées, comme lardées d’échardes,
d’épines par milliers et de morceaux de verre,
ils erraient, gémissant, vêtus de pauvres hardes,
un seul de leurs soupirs auraient ému la Terre.
On est ainsi transporté, 176 pages durant, dans une épopée graphique aux couleurs chatoyantes et aux détails subtils qui vont de l’arabesque florissante aux mille circonvolutions à la stylisation Art nouveau pour les personnages et animaux fondus dans le décor. L’auteur précise : «Je souhaitais que mon projet rende hommage à la peinture persane, sans pour autant vouloir imiter le dessin des miniatures. J’ai donc décidé de faire écho aux miniatures par le choix des couleurs : la vivacité, la luminosité et la finesse des gammes colorées employées dans la peinture persane».
Résultat, un enchantement pour l’œil qui se double d’une véritable émotion.
Car c’est dans le silence et le noir que s’allume,
pour ceux qui savent voir, la flamme du mystère.
Cette histoire est finie : je repose ma plume.
Pour entendre l’écho, il faut savoir se taire. (La Boîte à Bulles).
LE MÉGALODON TOUJOURS D’ATTAQUE !
On se souvient que le Mégalodon, gigantesque requin de 20 à 25 m de long apparu au Miocène, s’est éteint il y a environ trois millions d’années. Mais que, grâce à Christophe Bec, ce scénariste à la prodigalité inégalée (plus de cent albums à son palmarès), l’animal a pu ressortir de ses fosses océaniques dans sa série Carthago, créée en 2006, et qui compte aujourd’hui pas moins de 14 albums. Dont le dernier, Courbée, je me redresse vient de sortir, la bête s’étant démultiplié et poursuivant ses ravages en groupe, toujours traqué par l’intrépide plongeuse Lou, qui possède des branchies et des doigts palmés. Depuis le tome 6 dessinés par l’excellent Ennio Buffi, qui n’a pas son pareil pour croquer (sic) la bête en d’impressionnantes pleines pages ou doubles pages, les aventure de Lou et la Bête ne cessent de trouver du nouveau, ainsi du présent album, qui met en scène une secte monastique vénérant le gros poisson comme leur dieu, elle-même en conflit avec d’autre religieux plus traditionnels mais sachant manier le gourdin, jusqu’à ce que des pirates s’en mêlent pour corser le tout. Du grand spectacle, qu’on rêverait de voir s’animer sur l’écran, pourquoi pas devant la caméra de Spielberg ! (Les Humanoïdes associés).
HOMMAGE À SPIELBERG
Quand on parle du loup… «C’est l’histoire d’un petit garçon fasciné par les étoiles, terrifié par les requins, obnubilé par la télévision et le cinéma. Un garçon chétif, réservé, espiègle et doté d’une imagination débordante. Le jour où il découvre que la caméra 8 mm de son père lui permet de métamorphoser le monde qui l’entoure, sa vie change à tout jamais». C’est ainsi que Gilles Penso présente son héros, Steven Spielberg en personne, dans son ouvrage Steven avant Spielberg. Doit-on rappeler que l’auteur est un «vieux» fidèle de l’Écran, et qu’il est réjouissant de voir, ces temps-ci, plusieurs de nos collaborateurs présents à t’étal des librairies, et ce n’est pas fini ! Le but de Penso, ici, et de débusquer ce qui, dans l’enfance du chef, a été le point de départ de ses futurs films. On connait notamment l’histoire de son père l’emmenant une nuit voir les étoiles filantes, qui le fit rentrer en science-fiction avec cette certitude : «Rien de mauvais ne peut venir de là-haut», ce qui se traduira avec les «bons» visiteur d’outre espace visibles dans Rencontre… et dans E.T. C’est d’ailleurs à ce père qui, lui racontant tant d’histoires, dont sa participation à la guerre, sera à la base de son inspiration, pour la guerre bien sûr, mais aussi concernant un la présence indispensable de la famille, qu’on trouve dans la plupart de ses métrages. Penso nous fait ainsi, avec la clarté, l’aisance et la connaissance cinéphilique qu’on lui connait, revisiter sous un nouveau jour des films en principe connus par cœur, l’auteur avouant en conclusion qu’à fréquenter ainsi « Steven », il était devenu pour lui, à distance, un véritable ami (Michel Lafon).
EN SOUVENIR DE BERTRAND TAVERNIER
Il nous a quitté, comme il est coutume de le dire, le 25 mars de l’an dernier. Un choc, une douleur pour tous les cinéphiles, qui avaient su apprécier ses 26 long-métrages, très divers en apparence mais qui qui tous portaient sa marque, dont l’engagement social qui ne faisait aucunement ombrage à sa chaleur humaine. Mais Tavernier, c’est aussi son extraordinaire histoire du cinéma français, qu’il aimait tant alors que la plupart de ses confrères ne jurent que par le cinéma américain. Certes, les fantasticophiles pourront regretter qu’il n’ait réalisé qu’un seul film de sf (lui qui en étant un amateur de toujours), le beau La Mort en direct, avec la sublime Romy Schneider. Mais au cinéma, qui est un art mais aussi un commerce, selon les mots d’André Malraux, on ne fait pas toujours ce que l’on veut. Pour rendre hommage à ce grand disparu, Laurent Delmas, qui anima cet été l’émission «Tavernier, le cinéma et rien d’autre» diffusé cet été sur France Inter, a réuni dans le livre éponyme les témoignages de quinze de ses compagnons de route, actrices et acteurs essentiellement (Isabelle Hupert, Philippe Torreton, Nathalie Baye, Mélanie Thierry entre autres), qui le racontent et se racontent, à travers les thèmes préférentiels de ses films, la famille, la guerre, le jazz, l’Histoire, les femmes. 280 pages, nombre de photos de tournage, avec une seule conclusion : «Le cinéma de Tavernier ne cesse de nous accompagner» (Gallimard).
JEAN-PIERRE ANDREVON