Bathory, la légende vampirique
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DEUX BD À NE PAS MANQUER
On connaît bien sûr l’histoire (ou la légende) d’Elisabeth Bâthory, qu’on appelle aussi la comtesse maudite, née en 1560 en Transylvanie, principauté autonome qui va intégrer la Hongrie en rejetant l’emprise de l’empire Ottoman, le plus puissant de l’époque, et morte dans des circonstances mystérieuses en 1614, à l’âge de 54 ans. C’est cette destinée hors du commun qu’Anne-Perrine Couët s’est attachée à nous conter, en se basant sur des références historiques des plus sérieuses, dans l’album Bâthory, la comtesse maudite, où elle suit de l’adolescence à sa disparition cette femme accusée d’avoir fait enlever, torturer et saigner à mort plus de 600 jeunes paysannes des environs de son château de Cachtice afin, se baignant dans leur sang, de gagner la jeunesse et la beauté éternelle… Contrairement au beau film de Julie Delpy La Comtesse (2009), qui accréditait la légende, l’autrice-dessinatrice opte plutôt pour de sordides machinations politiques visant à s’emparer de ses terres et de ses richesse. Ceci dans un album de 168 pages, finement dessiné au trait, avec en fond de simples aplats beiges, qui intègrent au réalisme de facture enluminures et intégration d’images légendaires comme les combats avec des dragons. À conseiller aux amateurs de la Grande Histoire, les bédéistes comme amateurs de fantastiques n’étant nullement laissés de côté (Steinkis).
Après Le Syndrome [E] et Gataca, voici, avec Atom [KA] la troisième adaptation d’un roman de Frank Thilliez, un de nos meilleurs auteurs de thrillers, qui entraine ici son duo d’enquêteur, Lucie Hennebelle et Franck Sharko, dans un mystère dont les prémices remontent à bien loin, puisque la première page évoque la catastrophe de Tchernobyl. Alors quels rapports avec ce cadavre de journaliste retrouvé dans son congélateur, la disparition d’une collègue, ces femmes noyées, cet enfant perdu souffrant semble-il d’un mal des radiations ? Nos deux héros auront 112 pages, qui les conduiront jusqu’au Nouveau Mexique, pour résoudre l’affaire qui se conclura, et c’est là où l’intérêt de ces suspense haletant culmine, en pleine Ukraine, certes avant l’invasion de février, mais dans les territoires du Donbass déjà aux mains des Russes. Le scénariste Sylvain Runberg a réussi une adaptation sans temps mort (sans doute aurait-il pu éviter les continuels « Quelle horreur » !) et, au dessin Luc Brahy, familier du documentaire (cf. son album 13/11 Reconstitution d’un attentat), qui aligne ses cases de manière simple et efficace (Phileas).
CAZA EN TEXTE ET EN DESSINS
Ginkoo-Bilooba, sous -titré “Chronique d’une utopie modeste”, signé Philip Caza, se présente comme un fix-up de nouvelles déjà publiées ici ou là mais réorganisées en roman, et liées par des “Préludes” qui leur donnent une cohérence. L’auteur nous décrit ici une Terre d’après l’effondrement (la “Grande Bistouille”), causée par un virus dévoreur de plastique – et on sait bien que notre pauvre monde ne tient debout que grâce au plastique omniprésent – une planète où ne survit plus qu’un milliard de personnes au mieux, nombre idéal pour qu’on ne se marche plus dessus et qu’on n’épuise pas ce qui reste à épuiser. Avec humour certes, même un peu noir parfois mais plutôt optimiste, comme l’est sa porte-parole la jeune Valentina, Caza nous donne à voir la vie quotidienne dans une France devenue tropicale au XXIIe siècle (il y a des hippopotames et des crocodiles dans la rivière), dans une optique proche de l’An 01 de Gébé, et qui pourrait avoir été inspirée par les prédictions du collapsologue Pablo Servigne : ça va être dur sur le moment, mais ça ira mieux après. Un livre réjouissant de 318 pages que l’auteur, c’est bien le moins, a illustré d’une dizaine de dessins en couleur (Arkuiris). On peut aussi retrouver Caza pleinement graphiste en lui commandant ses très belles estampes et autres originaux.
PORTRAIT DE L’OURS
Ours éditions est une maisonnette d’édition spécialisée dans l’édition de textes courts, voire très courts et qui cherche (et trouve) des solutions simples, locales et fortement basées sur le travail manuel pour produire ses ouvrages. Tous les livres édités sont imprimés en reprographie et les cahiers sont pliés et reliés à la main, chaque ouvrage est le produit d’un travail amoureux. Tous les genres de la fiction sans discrimination sont au programme, ainsi que des essais en sciences humaines et sociales. Cette maison d’édition privilégie le travail des auteur·ices en leur laissant la propriété de leurs textes dès la publication de nos ouvrages et en leur servant 50% de droits sur les ventes. Il existe actuellement cinq collections, dont la principale est 22 222, la collection « historique » composée d’un cahier de 16 pages créé à partir d’une feuille A3, obtenant ainsi un livre de 16 pages au format 10,5 x 14,85 cm, simplement agrafé et livré non massicoté, les lecteur·ices retrouvant ainsi l’antique plaisir de découper leurs livres avant de se plonger dans la lecture. Une démonstration de la découpe est disponible en vidéo sur la page d’accueil du site. Pour les quatre autres, ne reste qu’à visiter l’antre de l’ours. Contacts, commandes, abonnement : ours.ka@pm.me
Dernière parution :
Une maison pleine de sang de Jean-Pierre Andrevon, un polar se déroulant dans le milieu du cinéma, ou comment un producteur fauché tombe dans un piège… très sanglant.
UN INÉDIT DE DINO BUZZATI
Reste-t-il encore du Buzzati inédit chez nous ? Contes de Noël et autres textes nous en apporte de la preuve. Réunis dans son pays en 2004, voici pas moins de 33 textes, nouvelles courtes, quelques poèmes et articles et un récit dessiné de sa main, autant d’histoire que l’auteur du Désert des Tartares a écrit sa vie durant, des années 30 quasiment jusqu’à sa mort en janvier 1972, à l’occasion des fêtes de Noël, et pour une grande part publiées dans le Corriere della Sierra, dont il fut un très fidèle collaborateur. Qui connait cet immense auteur italien pourra se douter que ces contes sont très loin des bluettes attendues en ce qui concerne cette période fête, Buzzati s’ingéniant à en faire ressortir l’inutilité, l’artificialité, la course stérile aux achats, dans son style neutre et froid, qui rend ces approches des plus efficaces. Ne citons que Stupidité des enfants (1949), où il réussit un raccourci entre nos charmants bambins attendant le Père Noël et ce qu’ils deviendront : « Pourquoi grandir ? Dans quel but ? Ils étaient bien proportionnés, mignons. Même les moins gâtés, ceux qui avaient une tête de petit cochon ou de crapauds (…) Regardez-les maintenant, quelle bande d’abrutis, gris et gras, des bêtes (…) Bientôt, ils vont commencer à se marier et, j’en mettrais ma main à couper, à semer à travers le monde d’autres enfants… » Pour qui aime cette férocité, un délice sur 250 pages qui, ainsi que le note la préfacière et traductrice Delphine Gachet, constitue aussi entre les lignes une fresque historique de l’Italie de l’époque coloniale à l’après 68 (Robert Laffont, “Pavillons”).
D’OÙ NAISSENT LES HISTOIRES ?
« Tous les jours sur la planète, des écrivains imaginent des histoires passionnantes tour à tour ancrées dans notre quotidien, au fil d’endroits familiers ou lointains, ou situés dans des univers fantastiques dont les contours sont inspirés de lieux bel et bien réels. » C’est sur cette phrase que s’ouvre Cent lieux mythiques de romans, qui fait partie de la collection Cultes ! où l’on trouve aussi les lieux de cinéma, de musique, de pop culture et de séries, autant d’albums luxueux, de très grand format, et retrouvant, photo à l’appui, les endroits qui ont suscité les œuvres de chaque catégorie abordée. Si nombre d’entre elles ne concernent pas les fantasticophiles stricto sensu, et ce serait dommage (le quartier général de la France libre pour L’Armée des ombres), si l’Aiguille creuse d’Etretat est bien connue des lecteurs de Maurice Leblanc, on sera surpris de voir le présent album s’ouvrir sur 1984 et le bâtiment du Ministère de la vérité («C’était une gigantesque construction pyramidale d’un blanc éclatant »), en réalité le Centre administratif de l’université de Londres, qui date de 1937 et ne peut qu’avoir servi de modèle à Gorge Orwell. Quant à l’hôtel Overlook de Stephen King, il s’agit en réalité du Stanley Hotel (Colorado), construit en 1909, Stanley Kubrick, qui n’en faisait qu’à sa tête, ayant préféré filmer le Timberline Lodge, dans l’État de l’Oregon. Pour reprendre un slogan bien connu des anciens lecteurs de Pilote, un magnifique ouvrage qui permet de s’instruire en s’amusant (Fantrippers).
DEUX RÉÉDITIONS
Un groupe de cinq cents personnes a été envoyé dans l’espace pour coloniser une autre planète. Dans un état de semi-conscience, ils suivent une éducation dispensée par une intelligence artificielle. Mais à la moitié de leur parcours initiatique, une explosion tue la majorité d’entre eux et détruit la plus grande partie de leurs vivres. C’est Une colonie, de Hugues Hovey, un space-opera innovant. Un astronaute américain sur le carreau se retrouve propulsé à des années-lumière de son rêve d’espace. À Rome et à Paris, d’étranges disparitions hantent les polices locales. On retrouve parfois les corps, certains portent les marques d’un suicide. D’autres ne réapparaissent jamais. Leur point commun ? On le saura en lisant Le Rhume, qu’accompagne Mémoires trouvés dans une baignoire, deux romans indispensables du grand Stanislas Lem (Actes Sud, “Babel”).
PLANÈTE B : UNE ÉMISSION DE SCIENCE-FICTION
La Volte lance avec Hugues Robert, libraire et chroniqueur SF pour Le Monde, et Antoine de St. Epondyle, auteur et journaliste : planète B., une émission de science-fiction mensuelle produite par Blast : le souffle de l'info, où il sera question de science-fiction politique, de grandes espérances et d'horizons déceptifs, d'écologie, surveillance, genre, dans la littérature, le jeu vidéo et la bande dessinée, de perspectives critiques pour penser le monde d'aujourd'hui et de demain.
JEAN-PIERRE ANDREVON