FILMS SORTIS
BARBIE
USA. 2023. Réal.: Greta Gerwig.
Hollywood alliée à Mattel a donc osé adapter l’inadaptable sur grand écran pour ce qui s’annonce d’ores et déjà comme le blockbuster de l’été 2023. Porté par l’écriture inclusive et néo-féministe ouvertement revendiquée du couple américain actuellement très en vogue, Greta Gerwig (« To Rome with Love » ; « Frances Ha » ; Lady Bird »)/ Noah Baumbach (« Les Berkman se séparent » ; « Mariage Story »), ce surprenant bonbon filmique acidulé aux vertus cérébrales et réflexives insoupçonnées ne va pas forcément vous faire voir la vie en rose… que vous soyez une fille ou un garçon !
S’ouvrant sur une magnifique scène singeant (c’est le cas de le dire) l’intro kubrickienne culte de « 2001, L’Odyssée de L’Espace », l’Ovni filmique rose-bonbon met en scène une petite fille en haillons d’un autre âge envoyant valdinguer sa vulgaire poupée démodée à travers les cieux et la galaxie pour la remplacer par… Barbie, jouet vivant aux mensurations parfaites, incarnée avec précision et conviction par la sculpturale Margot Robbie.
Bienvenue dans le royaume enchanté et pacifié, forcément nommé Barbieland, dans lequel les Barbies s’appellent toutes… Barbie et peuvent être à l’envi chanteuse, avocate, médecin… voire Prix Nobel de Littérature. Tout dépend de la force d’imagination de la propriétaire de l’heureux jouet ! A côté de ses femmes fortes, émancipées, dynamiques et éternellement belles, les garçons sont des « kékés » benêts (pléonasme) et se prénomment tous « Ken » ! Leur seule raison d’être est de bader les Barbies toute la journée. « Surfeur n’est pas mon métier ; Mon vrai métier, c’est plage ! » révèle sur un air ahuri qui devrait régaler les spectatrices, le fameux Ken principal blondinet, amoureux de Barbie, interprété avec brio et délectation par un très méconnaissable (mais toutefois fort bodybuildé et sans effets spéciaux !) Ryan Gosling.
Les jours s’égrènent invariablement sur le même mode et « sont parfaitement parfaits » avec chaque soir, l’organisation d’une grande « soirées filles » d’où les hommes réifiés sont tenus à l’écart et réduits à jouer les pom-pom boys au sourire systématiquement abruti et figé…. Jusqu’où jour ou Barbie « stéréotypée » (c’est son nom complet !) a une pensée morbide ! Eh oui, une blonde à l’allure de poupée peut exercer son entendement et faire preuve de réflexion, première étape philosophique vers la prise de conscience de soi et des autres, dans une démarche purement socratique et cartésienne. Cette première pensée dans ce monde enchanté et enchanteur a pour effet immédiat d’ouvrir une brèche temporelle (autre clin d’œil bien venu à quantité de films de science-fiction sur les couloirs du temps et les univers alternatifs) et à éjecter Barbie dans notre vrai monde, plus précisément le Los Angeles d’aujourd’hui !
Ne boudons pas notre plaisir de cinéphile. Les qualités plastiques, esthétiques et dynamiques du métrage (alternant prises de vue réelles, décors en jouets et cartons peints sans recours aux effets spéciaux numériques) sont excellentes, le rythme haletant et les acteurs en grande forme avec un plaisir de jouer fortement communicatif. Sans doute un futur classique de la pop culture mondiale qui nous fait en tout cas mesurer le grand bond en avant accompli par les studios et les scénaristes depuis le nanardesque « Maîtres de l’Univers », première grande adaptation au cinéma d’un jouet Mattel star, produit par l’inénarrable Cannon Group en 1987. Qui se souvient aujourd’hui des interprétations de Dolph Lundgren (Musclor), Meg Foster (Evil-Lyn) ou Frank Langella (Skeletor) dans ce sympathique naufrage signé Gary Goddard (Gary qui) ? Gageons que les incarnations de Barbie/Margot Robbie et de Ken/Ryan Gosling traverseront avec succès les générations et resteront dans les livres d’Histoire du septième art.
Laurent SILVESTRINI
LA MAIN ***
Australie. 2023. Réal.: Danny Philippou, Michael Philippou.
Premier film des jumeaux Philippou, cinéastes australiens sur qui reposera la lourde tâche de réadapter sur grand écran la saga de jeux-vidéo Street Fighter, La Main est une plutôt belle surprise. Le film raconte comment une bande d’adolescents en possession d’une mystérieuse main en pierre, reliant le monde réel à celui des esprits, perd le contrôle sur celle-ci après qu’une de leurs expériences de spiritisme a mal tourné. En effet, au milieu d’une soirée alcoolisée, ils ont enfreint la seule règle de l’objet hanté : ne jamais le tenir plus de 90 secondes. Réduire le métrage à son seul synopsis, que l’on admet volontiers déjà-vu en long et en large, serait une erreur : c’est parce qu’il sait parfaitement dans quels motifs horrifiques il s’inscrit que La Main parvient à surprendre. En effet, dès ses premiers instants, le film embrasse pleinement son identité de Teen movie d’épouvante pour mieux en retourner certains attendus, notamment en ce qui concerne la violence. Si l’on peut s’attendre au début à un objet regorgeant de jumpscares sans réelles conséquences physiques, force est de constater quelques dizaines de minutes plus tard que cette main est moins un simple portail vers l’au-delà que son poing vengeur : ce film est l’un des plus violents et impitoyables vus cette années. La peur qu’il suscite vient de son caractère frontal. Très adroits dans leur mise en scène – et grâce à un montage au cordeau – les frères Philippou parviennent à rendre chaque scène viscérale, notamment lorsque, manipulés par la main, les personnages s’infligent eux-mêmes des supplices (on n’avait pas autant serré les dents au fond de notre fauteuil depuis la séquence du lavabo dans Titane de Julia Ducournau). On peut dire qu’un tel sens de l’impact est porteur de promesses vis-à-vis de leur future adaptation de Street Fighter. En revanche, le récit déployé ici ne convainc pas toujours. Souvent prévisibles, quasiment tous les pivots narratifs – pensés comme des coups de théâtre – ont tendance à tomber à plat. Heureusement qu’un malin twist final vient, mais un peu tard, apporter ce petit supplément d’âme dont le récit avait besoin.
Jérémie ORO
FILMS EN VOD
MEGALOMANIAC ***
Belgique. 2022. Réal. et scén.: Karim Ouelhaj. (Shadowz).
Martha et Félix sont les enfants du Dépeceur de Mons, un serial-killer qui, durant les années 90, a sévi en Belgique. Si Félix poursuit l’œuvre meurtrière de son père, sa sœur, quant à elle, est renfermée et peu sûre d’elle. Mais le jour où elle se fait agressée sur son lieu de travail, son existence bascule totalement…
Récompensé par le Prix du Meilleur Film au festival FanTasia en 2022, Megalomaniac est une œuvre à la fois violente, brutale, étrange et angoissante. S’inspirant librement des méfaits du Dépeceur de Mons, un tueur en série qui assassinait des femmes, en Belgique, dans les années 90 et qui n’a jamais été arrêté, le métrage de Karim Ouelhaj ne laisse pas indifférent. L’histoire, ainsi, démarre fort par une scène d’accouchement extrêmement sanglante qui plante en quelques secondes l’atmosphère glauque et poisseuse de cette production wallonne. On songe dans un premier temps à Henry, Portrait of Serial Killer, le chef-d’œuvre de John McNaughton, le réalisateur optant pour une approche crue et réaliste de son sujet, comme en témoigne la scène du viol de Martha ou encore celles montrant les exactions commises par Félix. Puis, le récit prend une tournure véritablement effrayante quand la jeune femme, après avoir subi son agression, est hantée par des visions cauchemardesques. La folie dans laquelle sombre Martha est particulièrement bien rendue et renforce l’impact psychologique de l’ensemble. À partir de là, l’horreur ne fait que s’accentuer durant près d’une heure et ce, jusqu’à un dénouement qui semble inéluctable. Intense et sanglant, Megalomaniac doit beaucoup de sa réussite à la mise en scène, maîtrisée et inspirée de Karim Ouelhaj. Cadrages pertinents, mouvements de caméra fluides, utilisation du hors-champs… Aidé par un remarquable travail photographique dû à François Schmitt, le cinéaste, tout en concevant des images à l’onirisme macabre, façonne une ambiance froide, angoissante et incestueuse et parvient à tirer profit de ses décors anxiogènes, à commencer par la maison où vivent le frère et la sœur et qui s’impose comme un personnage à part entière. À cela s’ajoute l’interprétation des deux comédiens principaux, Benjamin Ramon et surtout Eline Schumacher, remarquables de justesse et d’intensité. Alors certes, tout n’est pas parfait, le métrage souffrant notamment de quelques longueurs, mais Ouelhaj signe à l’arrivée une œuvre horrifique violente et réaliste qui lui permet d’exprimer tout son talent. Ames sensibles s’abstenir.
Erwan BARGAIN
ILS ONT CLONÉ TYRONE
(They Cloned Tyrone). USA. 2023. Réal. : Juel Taylor. (Netflix).
Dans un quartier défavorisé d’une grande ville américaine, Fontaine, un dealer dont les activités sont menacées par la concurrence, est froidement abattu par les membres d’un gang ennemi. Pourtant, le lendemain, il se réveille indemne dans son lit. Comprenant l’anormalité de la situation, il va alors, en compagnie de Slick, un proxénète, et de Yo-Yo une de ses prostituées, mener son enquête et mettre à jour un vaste complot gouvernemental…
Un film à la croisée des chemins entre Get Out, L’Invasion des profanateurs de sépultures et The Truman Show, le tout rendant hommage à la Blaxploitation. Ainsi pourrait-on résumer en quelques mots ce premier long-métrage de Juel Taylor, jusqu’ici connu comme scénariste de titres tels Creed 2 ou encore Space Jam : Nouvelle ère. Ils ont Cloné Tyrone marie en effet, avec un certain brio, action, mystère, SF et humour, et s’impose, malgré quelques longueurs, comme un excellent divertissement satirico-fantastique. Débutant comme une histoire de gangs et de dealers de drogue, l’histoire prend rapidement une tournure science-fictionnelle et déroule une intrigue passionnante et pleine de rebondissements. Les aventures de ce trio improbable confronté à des évènements qui les dépassent totalement sont assez savoureuses et réservent de nombreuses séquences désopilantes, à l’image de celle dans l’ascenseur ou encore ce passage où les héros découvrent le laboratoire. Baignant dans une ambiance 70’s et revendiquant sa personnalité résolument funky, Ils ont Cloné Tyrone parvient à trouver le juste équilibre entre les différents genres qu’il aborde et alterne purs moments de comédie et épisodes de suspense. Si le titre, en lui-même, dévoile un pan du récit, Juel Taylor démontre qu’il a plus d’un tour dans son sac pour maintenir le spectateur en éveil, notamment en donnant à l’enquête de trois complices une dimension ouvertement sociale et politique. Et puis, il y a les trois comédiens principaux, John Boyega, Teyonah Parris et Jamie Foxx, formidables dans leurs rôles respectifs et qui forment un trio auquel le spectateur s’attache instantanément. Autant d’atouts qui font la réussite de cette production fort fréquentable.
Erwan BARGAIN
NEWS
LE RETOUR DE GAMERA
Gamera, le célèbre monstre japonais, reviendra sous la forme d’une série d’animation sur Netflix le 7 septembre. Dans «Gamera Rebirth», Gamera affrontera cinq Kaiju différents, dont Gyaos, Jiger, Zigra, Guiron et Viras. Le projet a été initié par Shusuke Kaneko, qui a réalisé la trilogie du personnage dans les années 90. L'annonce du retour de "la tortue géante" a suscité beaucoup d'attentes au pays de Godzilla puisqu'il faut remonter à 2006 pour voir son dernier long-métrage en date.