ANGOISSE : UN DERNIER TOUR DE PISTE
Même nos plus jeunes lecteurs ont entendu parler de la fameuse collection “Angoisse” publiée par le Fleuve Noir de 1954 à 1974, pour 261 volumes estampillés sur leur tranche de la tête de mort dessinée par Gourdon. Une série que les plus anciens ne cessent de regretter, malgré quelques rares rééditions (les « Madame Atomos » par exemple) et qui sut recueillir les meilleurs auteurs de l’époque : Kurt Steiner, Marc Agapit, B. R. Bruss… Sous la direction de Philippe Gontier et Laurent Mantese, qui ont abattu un travail de recherche considérable, la collection a su trouver sa renaissance en même temps que son mausolée. Sous la forme de trois volumes, dont les deux premiers, en 2021, et dont nous avons rendu compte en leur temps analysaient, l’un après l’autre et par ordre chronologique, tous les volumes publiés ; et voici qu’arrive enfin, très attendu, le 3, Angoisse, exploration d’une collection, un pavé de 450 pages, où les maîtres d’œuvre reviennent en détail sur tous les auteurs figurant au catalogue de la collection, entre ceux qui n’eurent droit qu’à une seule publication (Jimmy Guieu) et le champion toutes catégories, Marc Agapit, avec ses 43 romans, qui bénéficie d’un dossier de… 43 pages peaufinées par Laurent Mantese. De nombreux auteurs s’expliquent dans une interview, parfois ancienne car, ainsi qu’il est précisé en fin de volume, de tous les écrivains ayant participé à la collection, ne reste plus que trois survivants, dont nous tairons le nom. De plus, l’ouvrage dévoile pour la première fois la véritable identité de tous les participants à l’aventure, qui œuvraient souvent sous pseudonyme. S’il est bien connu que les six « Frankenstein » signés Benoît Becker étaient de la plume du seul Jean-Claude Carrière, on apprendra que les trois très rares “Patrick Svenn” (« Le Fantôme aveugle ») furent écrit par José-André Lacour… qui signait aussi Benoît Becker, par exemple pour ce chef-d’œuvre qu’est « Terreur » et que les cinq D. H. Keller, longtemps attribué à Henri Bessière ont pour auteur le second membre du duo, François Richard. Des détails ne pouvant intéresser que les spécialistes et les nostalgiques ? Voire, car la saga d’Angoisse se lit comme un véritable roman à énigme, en plus qu’il communique une envie féroce de (re)lire un par un tous ses ouvrages, bien calé contre son oreiller (Artus).
UNE APOCALYPSE DE PLUS
Est-ce l’effet des bouleversements climatiques qui se font sentir de manière de plus en plus intenses, avec les catastrophes qui en découlent ? La SF, quand elle explore le futur proche, échappe de plus en plus rarement – et comment ferait-elle autrement ? – à une approche catastrophique, ou cataclysmique, même quand l’effet de serre en lui-même n’est pas directement concerné. C’est le cas d’Aurora, signé David Koep, où une éruption solaire d’une intensité jamais observée déferle sur notre planète… « dix milliards de tonnes de particules chargées, provoquant l’apparition d’un flux électrique d’une virulence sans précédent ». Résultat, les lignes électriques fondent, tout saute, et la Terre entière se retrouve sans électricité en quelques heures. Et on sait parfaitement qu’en cas de disparition du courant, la civilisation s’effondrerait en 48 heures, ce qu’avait déjà prévu Barjavel il y a 80 ans. Pour traiter ce sujet, et sans doute pour éviter des scènes de panique et de violence sociale qu’il a sans doute jugé trop vues, l’auteur s’est concentré sur l’intimisme, à travers quelques personnages dont Thom Banning, un milliardaire qui s’est aménagé par précaution un bunker de survie, et sa sœur Audrey, qui à l’inverse erre sur les routes. Si David Koep, dont c’est le premier roman (doit-on rappeler qu’il est le scénariste de Jurassik Parc et des Mission impossible ?) a une bonne plume pour décrire le quotidien d’une zone de guerre, on regrette tout de même que, tout à son étude de mœurs agrémentée d’une sous-intrigue criminelle, il a (volontairement ?) oublié ce qui se passe dans le monde, d’autant qu’au bout de 18 mois tout semble revenu à la normale. Certainement, cela ferait un bon téléfilm. Pour un roman de plus de 300 pages, on est tout de même un peu frustré (J’ai lu – « Nouveaux Millénaires”).
OLIVIER LEDROIT ET SES BELLES DE NUIT
Le premier artbook érotique d’Oliver Ledroit nous transporte dans un univers à la beauté vénéneuse, où de superbes femmes s’offrent avec audace et impudeur au regard du lecteur. Ledroit développe ici son imagerie « dark » en révélant son versant charnel et séduisant, dans les contrées nouvelles qu’il évoque avec grâce en magnifiant le corps des femmes dans un ensemble d’images où s’entremêlent imaginaire cuir et bondage, élégance baroque et sensualité sombre. Cette nouvelle édition enrichie reprend le contenu et la maquette de l’édition de 2013, en y ajoutant de nouvelles œuvres inédites. Ledroit travaille chacune de ses planches directement en couleur, jouant avec les effets de matières et les volumes. Il se révèle un véritable chef de file de cette génération d’auteurs apparue au début des années 1990, fascinée par l’heroic fantasy, les jeux de rôle et la nouvelle BD anglo-saxonne. Rappelons qu’avec le scénariste Froideval, on lui doit les Chroniques de la Lune noire et, avec Pat Mills, la série de dark fantasy Requiem, chevalier vampire. On pourra voir ses originaux dans l’exposition Belles de nuit à la Galerie Barbier, 10 rue Choron, Paris 9e, jusqu’au 27 mai.
NAVIGUONS AVEC LES PIRATES !
En 1718, au large de la Caroline du nord, deux vaisseaux anglais parviennent à coincer la goélette du fameux pirate Barbe Noire. Après un abordage et une bataille féroce, ce dernier, jusque-là invaincu, est décapité par le capitaine Maynard. Deux ans plus tard, sa fille, Aléa Drumman, sauvageonne qui sait manier l’épée aussi bien que feu son père, retrouve par hasard l’officier, depuis exclu de la Royal Navy. Au cours du duel qui les oppose, Maynard parvient à convaincre la jeune femme que la tête du pirate a survécu par magie, tombée aux mains du pirate Racklam. Faisant désormais équipe, Maynard et Aléa vont se lancer à la recherche de ce trophée d’un nouveau genre… Retrouver les pirates, avec un clin d’œil à ceux des Caraïbes, mêlés à un thème fantastique, est toujours une bonne idée, exploitée avec verve par le scénariste Dobbs, dans l’album Aléa Drumann, que Siamh dessine avec panache pour les nombreux duels qui donnent sa dynamique à ce qui n’est qu’un premier tome (L’Héritage de Barbe Noire), lequel donne très envie de connaître la suite et fin dans le suivant (Glénat).
AMUSONS-NOUS AVEC LES STUDIOS GHIBLI !
Plongez au cœur des films des studios Ghibli avec 10 modèles originaux à crocheter ! Découvrez 10 modèles à crocheter inspirés de l'univers fantastique des studios Ghibli avec Studios Ghibli, Le Livre du crochet. Patrons, explications : on trouvera dans ce livre tout le nécessaire pour créer en crochet les créatures les plus emblématiques et mignonnes des films d'animation ! Totoro, la Princesse Mononoké, Sans-Visage, ou encore la petite sorcière Kiki et son adorable chat Jiji n'attendent plus que vous ! Avec Fabrique tes créations inspirées des studios Ghibli, on peut créez 14 projets de DIY inspirés des films du studio Ghibli grâce à ce livre: des pots de fleurs en forme des robots de Laputa du Château dans le ciel, une guirlande envahie par de noiraudes du Voyage de Chihiro, des porte-clés Kodama de Princesse Mononoké ou encore un marque-page Totoro, il y en a pour toute la famille ! Un livre d'instructions pour réaliser ces 14 créations 100 % studio Ghibli (404).`
Jean-Pierre Andrevon
QUELQUES FIN DU MONDE SELON ANDREVON
Avec Fin du Monde : le Quatrième Actes, notre collaborateur Jean-Pierre Andrevon, avec ce petit opuscule de 16 pages, taille poche révolver, l’auteur nous fait vivre les derniers instants d’une famille confrontée à trois hypothèses d’extinction de notre humanité, ou inhumanité, ce qui revient au même.
Première façon, la plus évidente diraient sans doute les climatologues, la cuisson à feu doux, celle qui laisse le temps de mariner dans son jus avant que les carottes soient cuites et les corps bouillants bien bouillis exultant leur ultime oraison jaculatoire.
Autre manière de conclure la sixième extinction massive : l’hivernation par inversion rotative du globe et interruption du courant océanique bien connu des Séminoles. De quoi reléguer au rang de vulgaire antiquité un gelàto napoletàno, par exemple, et de vouer aux gémonies les championnats de sculptures sur glace. Un épisode notablement romantique au contraire du précédent.
Enfin, pour couronner le tout, troisième terminus pour les Terriens : le bain de pieds et le barbotement en eau saumâtre avec plongée dans les abysses de rigueur. On a les fins du monde qu’on veut grâce aux divers scénarios du métavers.
D’ailleurs, il suffit de tirer les rideaux des fenêtres pour s’assurer que tout n’était qu’illusion d’apocalypse.
Quel temps fait-il ce jourd’hui ? (Ours éditions)
Jean-Pierre Fontana