Absolute Superman, absolute Batman, absolute Wonder Woman, absolute DC !
Le nouveau Métal Hurlant de l'été
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UN, DEUX, TROIS PICCARD VOLENT ET PLONGENT
Pourquoi trois, et qui sont-ils ? Les Piccard, à commencer par le père, Auguste, physicien belge bien décidé à étudier les trayons cosmiques à haute altitude et inventa une cabine pressurisée sphérique qui, attachée au plus gros ballon du monde, réussit en 1931 à atteindre les 15 500 mètres avant de se crasher (sans mal) dans les Alpes Suisses. Et à qui l’on doit aussi le bathysphère, sur le même modèle mais lui conçu pour explorer les fonds marins, 1360 mètres en 1948. Son fils Jacques, qui poursuivit les recherches de son père et dont le Trieste, sorte de sous-marin expérimental, s’enfonça jusqu’ 10 916 m dans la fosse des Mariannes, le point océanique le plus profond au monde. Quant au petit-fils, Bertrand, plus casse-cou et retourné vers les hauteurs, après avoir fait le premier tour du monde en ballon en 1999, il sera à la base de l’invention du Solar Impulse, le premier avion solaire. C’est l’aventure de cette famille pas comme les autres, «pionniers du ciel et des abysses» que Jean-Louis Duhoo, dessinateur de presse à la base, raconte par le menu sur les 2OO pages d’un album qui nous fait rêver à chaque planche avec ses petits dessins rigolos mais toujours d’une parfaite exactitude scientifique, où il n’oublie ni le fait que c’est Auguste qui inspira à Hergé (qu’on repère dans une case) son professeur Tournesol, ni sa rencontre d’Auguste avec Von Brown. Et pour ce qui du Mésoscape, «sous-marin touristique» qui emmena 30 000 passagers explorer les fonds du lac Léman, qui n’aurait voulu y prendre place ? (Dargaud).
PETITS FORMATS
Les éléphants ont été exterminés pour leur ivoire par des braconniers agissant pour des oligarques chinois. On sait cela, même s’il s’agit d’une vision prospective, ce qui ne l’empêche pas d’être possible, voire probable. Dans 50,100 ans ? Une époque où, pour les «remplacer», si l’on peut dire, des mammouths clonés hantent la taïga – une possibilité comme on sait très sérieusement envisagée. Mais si les mêmes situations suscitaient les mêmes problèmes ? Et voilà que les mammouths de ce futur sont pareillement chassés et exterminés, à quoi s’ajoute le fait que ces animaux artificiels ne sont pas adaptés à leur environnement. Que faire ? Peut-être alors que Damira Khismatullina, éthologue de renommée mondiale, spécialiste des pachydermes ayant dédié sa vie à la défense des éléphants du continent africain peut avoir la solution. Seulement elle a été assassinée par des braconniers il y a bien longtemps. Oui, mais si son cerveau a été gardé et peut encore servir ? Ray Nayler, chercheur à l’Institut fort international Science and Technology Policy de l’Université George Washington nous donne une solution dans Défense d’extinction, ouvrage qui se caractérise et par une écriture aussi dense que poétique – qui n’exclut pas des séquences à vous soulever le cœur – et une parfaite connaissance des mœurs des pachydermes, au présent comme au passé. Et ceci en 150 pages, sous couverture de la collection toujours intéressante “une heure lumière” des éditions du Bélial’. Qui publie en même temps, signé Robert Jackson Bennett, la novella À lire à ton réveil où, en 1949, un ethnologue britannique s’exile en Lorraine pour faire des recherches sur une antique abbaye qui va lui réserver bien des surprises, dont un voyage dans le temps. Présenté sous la forme de lettres que James envoie à son amant demeuré en Angleterre (ce qui peut être légèrement irritant), voici un conte inhabituel d’un auteur qui fit sensation avec American Elsewhere et qui ici se contente d’une centaine de pages dans la même collection, mais qu’on peut retrouver dans un pavé qui en compte 570, La Cité des lames, une fantasy qui se trouve être le second volume de sa série des Cités divines (Albin Michel, “Imaginaire”). Revenons brièvement au petit format avec Histoire illustrée du XXe siècle, où Kim Stanley Robinson, qui a nous avait déjà assommés avec son prospectif Ministère du futur (Grand Prix de l’imaginaire 2024 s’il vous plait) s’est essayé en 1988 à parler de son époque sans rien en dire d’intéressant. Une exhumation dont on peut donc se passer, mais pour laquelle on ne tiendra pas rigueur au Passager Clandestin et sa d’ordinaire excellente collection “Dyschroniques”.
LE MÉTAL DE L’ÉTÉ
Oui, il s’agit bien du numéro 15 de Métal Hurlant, Les Mondes du silence, qu’on peut considérer, du haut de ses 272 pages regroupant pas moins de 30 récits, comme un numéro de vacances et d’été puisque les bd présentées, toutes d’auteurs peu connus, se passent sur l’eau, ou bien au fond, où à côté, sur la plage. Thierry Frissen présente son bébé en racontant que l’idée lui en est venu alors qu’il se baignait dans le loch Ness et qu’il a vu venir à lui le Monstre (on n’est pas obligé de le croire). Si beaucoup de récits sont poétiques, oniriques, esthétiques, certains adaptent néanmoins l’actualité, comme Mocha, pêche interdite (Marc Caro et Cecyle Bay) où râcler le fond de mer d’une planète océan comme on le fait sur Terre peut se révéler très dangereux. Cette mise en garde retrouve dans les articles, où on lira avec passion une longue interview de Paul Watson sortant de sa prison, dont on ne s’étonnera pas qu’il ait lu Brunner et Asimov, où celle du camarade Jean-Marc Ligny, chantre du « climate ficion”. En somme, que du bon !
DC ET SES TROIS HÉROS EMBLÉMATIQUES
Kal-El vient bien de la planète Krypton, à neuf millions d’années-lumière de la Terre mais, non seulement il n’a pas été recueilli bébé par la brave famille des Kent, mais il a atterri jeune homme, dans une favella du Brésil où des mineurs crèvent en exploitant une mine d’amiante sous la férule de l’oligarchie Lazarus Corps, qui tient la planète sous sa coupe. Aussi, grâce à sa force colossale, Kal-El, bientôt nommé Superman, va aider les mineurs dans leur révolte, ce qui attirera sur lui les hordes de la police de Lazarus, dont le chef n’est autre que l’agent… Lane. Les Poussières de Krypton, scénario de Jason Aaron, dessin de Rafa Sandoval avec les couleurs d’Ulisses Arreola, fait partie d’une revisitation par la firme DC de ses personnages les plus célèbres sous le sigle “absolute”, comme ici Superman dans un premier tome largement consacré aux flashbacks nous renvoyant sur Krypton, dont les ressources naturelles sont en passe d’être laminées par la politique de la Guilde Scientifique, ce qui va causer sa perte. En somme, d’un monde à l’autre, mêmes causes mêmes effets dans les 144 pages d’un album qui modernise l’homme d’acier de jadis jusqu’à en faire un turbulent et échevelé sauvage que le trait acéré Dandoval exalte dans des planches d’une extrême violence.
L’absolute Batman, lui, retrouve son statut initial de “detective” dans Le Zoo où, sous la plume de Scott Snyder et le pinceau de Nick Dragota, il doit affronter le gang des Bêtes de soirée, tueurs aux masques d’animaux qui assassinent à tout va dans un Gotham déliquescent où approchent des élections pouvant porter au pouvoir le commissaire Gordon, ce qui n’est du goût de certains. Là encore, celui qui se cache sous l’armure renforcée de piquants du Bat est lui aussi un adolescent rebelle, qu’on voit constamment s’entraîner dans une salle de sport, ce qui le dote d’une musculature à la Hulk dont il use sans mesure et sans les précautions du Batman classique. Dans Batman – Dark Pattern (scénario Dan Watters, dessin Haydern Sherman), il se heurte à un cas sortant de l’ordinaire, où trois victimes successives sont retrouvées le corps lardé d’aiguilles métalliques enfoncées de façon à provoquer la souffrance sans causer la mort. Et quelle n’est pas sa stupéfaction quand il découvre que le criminel, appelé “L’homme blessé” a lui aussi le corps criblé de clou. Un assez court récit (80 planches) qu’on verrait bien porté à l’écran par Cronenberg.
On en termine avec l’absolute Wonder Woman (tome 1, La Dernière Amazone) scénario de Kelly Thomson, dessin du même Hayden Sherman, qui s’attarde sur les origines mythologiques de Diana, princesse des amazones exilée aux Enfer où elle est élevée par sa mère Circé, après que les dieux les aient bannies. Plus encore que ses deux futurs complices masculins, les fans de Gal Gadot auront du mal à reconnaître la nouvelle Wonder Woman, gainée de cuir rouge et noir, adieu la jupette, montant un cheval réduit à un squelette et affrontant, armée de l’épée dAthena plus grande qu’elle, des monstres gigantesques, dont le Tétracide surgissant des flots, que Sherman, qui n’a pas laissé son talent dans sa poche à pris plaisir à dessiner. Le total chez Urban Comics.
LES ARTS URBAINS À PARIS
Zoo Art Show Paris la Défense ouvre ses portes ! Il s’agit d’un immeuble vacant, d'une surface de 4000 m2 en plusieurs étages, réhabilité avec un musée, des parrains et DA de choix, de multiples facettes (lives shows, ateliers, restauration, animations, ...), 500 artistes parisiens, nationaux et internationaux, des surprises de juin à décembre 2025 et prolongation en 2026 déjà envisagée. Ce nouveau projet, qui dépasse le cadre de l'exposition de street-art, est un véritable musée des arts urbains avec une visite en sons, effets, lumières, sensations, totalement immersive et expériencielle. 4 place de la Défense, 92800 Puteaux, accès par le RER A, ouverture le 7 juin. Bonne route !
Jean-Pierre ANDREVON